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Le Sacrement de la «désévangélisation»

Rogier van der Weyden. Retable des sept Sacrements.
(Rogier van der Weyden. Retable des sept Sacrements. [Source])

1) Qu'est-ce que «l'évangélisation»?

Supposons que vous êtes en affaires, par exemple que vous avez une petite compagnie qui fabrique des bottes. Si vous voulez que votre petite compagnie devienne grande et prospère, qu'allez-vous faire? Vous devrez faire bien des choses, mais une des plus importantes sera certainement de fabriquer un produit excellent, dans ce cas-ci des bottes extraordinaires qui vont subjuguer vos clients par leur qualité supérieure.

Pourquoi? Parce qu'un produit extraordinairement bon vous attire des quantités extraordinairement élevées de nouveaux clients, et vous assure l'extraordinaire fidélité des clients que vous avez déjà.

À chaque pas, c'est le cas de le dire, vos bottes vont faire passer le message de leur confort, de leur solidité, de leur aptitude à protéger les pieds contre les blessures, et à éliminer les dérapages sur un sol mouillé ou glacé, etc.

Non seulement chaque acheteur de vos bonnes bottes va-t-il être de plus en plus convaincu de leur grande qualité, mais chaque acheteur va se transformer en «apôtre» pour vos produits, car il va parler à temps et à contre-temps de vos merveilleuses bottes aux gens qu'il va rencontrer sur son chemin. Et inévitablement, des histoires encore plus surprenantes vont commencer à circuler: un alpiniste qui a failli faire une chute mortelle mais qui a été sauvé par vos bottes qui ne dérapent pas, ou un pompier qui a pu entrer dans une maison en feu pour sauver des enfants car ses bottes l'ont protégé du plancher brûlant, etc.

Ainsi, toutes autres choses étant égales, votre réputation va s'accroître, vos clients existants ne vous abandonneront pas, et de nouveaux clients seront continuellement dirigés vers vous. Tout ceci grâce à la publicité de «bouche à oreille» des gens qui portent vos bottes extraordinaires. Remarquez que comme le verbe  «évangéliser» signifie «répandre la Bonne nouvelle» de notre Rédemption, on pourrait presque parler du travail «d'évangélisation» de vos bottes extraordinaires. En effet, une bonne paire de bottes est une bonne nouvelle qui se répand vite.

À l'inverse, une compagnie qui veut noircir sa réputation, exterminer sa clientèle et repousser tous les clients potentiels n'a qu'à sabrer dans le contrôle de la qualité. Les professeurs d'administration des affaires pourront vous donner une longue liste d'exemples concrets de compagnies qui étaient riches et prospères, et qui se sont auto-détruites simplement en se mettant à fabriquer de la cochonnerie. En d'autres mots, des compagnies qui ont fait une campagne de «désévangélisation».

2) Comment les bons Sacrements pourraient-ils «désévangéliser»?

N'y a-t-il pas un parallèle intéressant à établir ici avec les sacrements de l'Église catholique? On pourrait dire que les sept sacrements (le Baptême, la Confirmation ou Chrismation, l'Eucharistie, la Pénitence ou Confession, l'Onction des malades, l'Ordre, le Mariage [CÉC N° 1113]) sont un peu comme les «produits» offerts par l'Église. Si on élimine le «contrôle de la qualité» pour ces «produits», on va noircir la réputation de l'Église, exterminer les fidèles, et repousser les non-croyants. En effet, un «mauvais sacrement» transmet une mauvaise nouvelle. Il est une sorte de «mauvais produit» qui cause une «désévangélisation».

Bien sûr, parler de «mauvais sacrement» est dans un sens une contradiction dans les termes car un sacrement est essentiellement bon, ayant été institué directement par Dieu. Mais il nous semble que dans un autre sens, on peut parler jusqu'à un certain point de «mauvais sacrement». (Attention! Cette question est théologiquement compliquée, et je n'ai pas une formation adéquate, alors n'oubliez pas la Considération juridique N° 6: «S'il devait y avoir un désaccord entre le Pape et moi, c'est le Pape qui a raison».)

En quel sens peut-on parler d'un «mauvais sacrement»? Mentionnons entre autres:

2.1) La superstition. «Attacher à la seule matérialité des prières ou signes sacramentels leur efficacité, en dehors des dispositions intérieures qu'elles exigent, c'est tomber dans la superstition.» [CÉC, N° 2111].

2.2) Les prêtres qui n'ont pas l'intention de faire ce que fait l'Église. Les sacrements confèrent la grâce ex opere operato (par la puissance du rite sacramentel achevé) [Denzinger N° 1608], et non par la sainteté du prêtre [Denzinger N° 1612]. Par contre, un prêtre qui change intentionnellement et de manière non-négligeable le rite, ne confère pas le sacrement [Denzinger N° 3318]. Par exemple, un évêque qui tente de conférer le sacrement de l'Ordre à une femme, ou un prêtre qui dit la messe avec un calice rempli de bière plutôt que de vin, etc.

2.3) La personne qui s'oppose à recevoir le sacrement ne reçoit ni la grâce, ni le caractère du sacrement. [Denzinger N° 781].

2.4) La personne qui met obstacle à la grâce ne reçoit pas la grâce sanctifiante. [Denzinger Nos. 1451, 1606, etc.]. Nous verrons plus bas certaines des manières par lesquelles ont peut mettre obstacle à la grâce.

Etc., etc.

En général, le «mauvais sacrement» est un sacrement qui est dispensé pour de mauvaises raisons, ou aux mauvaises personnes, ou avec le mauvais rite, etc.

3) Les Sacrements, feuille de vigne pour cacher une nudité spirituelle honteuse

On pourrait penser que la cause fondamentale de ces défauts est la «foi sociologique», c'est-à-dire l'absence de foi. Par exemple, les gens qui se marient ou qui font baptiser leur enfant parce qu'ils cèdent à la pression de leur famille, ou parce qu'ils aiment la réception avec les petits sandwiches de pain blanc en forme de triangle.

Peut-être la «foi sociologique» explique-t-elle certains cas. Mais je prétends que la cause profonde est probablement moins innocente qu'une simple tendance à «faire comme les autres», à «suivre le troupeau». Je prétends que la cause profonde ressemble probablement plus à une honte, à une honte de sa propre «nudité» spirituelle, qui fait qu'on tente d'utiliser les sacrements de l'Église catholique comme des «feuilles de vigne» pour cacher son péché. Un peu comme Adam et Ève au jardin d'Éden, de nombreuses personnes ont tué Jésus-Christ dans leur coeur, et se retrouvent maintenant plus ou moins consciemment devant leur crime honteux.

Selon moi, les simples fidèles qui jouent ce jeu hypocrite sont bien moins coupables que certains chefs religieux (diacres, prêtres et évêques) qui eux aussi ont une «nudité» spirituelle à cacher, et qui donc sont tout à fait empressés à jouer le jeu, et à dispenser ces sacrements sans trop poser de questions. Pourtant, l'Église ne manque pas de règlements pour empêcher ces abus:

3.1) Le Baptême. Combien de parents font baptiser leur enfant alors qu'eux-mêmes n'ont ni la foi, ni la moindre intention d'élever leur enfant dans la Foi catholique? Pourtant, aucun prêtre ne devrait accorder ce sacrement dans ces conditions [Code de droit canonique, N° 868.2; et Denzinger N° 4674]. Et que dire des parrains et marraines purement «décoratifs»? Pourtant, ils devraient être écartés en faveur de gens vraiment catholiques, qui peuvent et veulent s'assurer que l'enfant sera éduqué dans la foi [Code de droit canonique, Nos. 871.1 et 874.3].

3.2) La Confirmation. Comme pour le Baptême, on ne doit pas confirmer une personne qui n'a pas la foi, ou qui ne la connaît pas assez bien au point où elle ne peut pas la pratiquer correctement [Code de droit canonique, N° 889.2].

3.3) La Confession. On ne doit pas accorder l'absolution à une personne qui ne se repent pas ou qui ne veut pas changer son style de vie [Code de droit canonique, Nos. 980, aussi Misericordia Dei N° 7(c), etc.]. On ne doit pas non plus donner l'absolution collective, comme on le fait ici au Québec Misericordia Dei N° 2 (e)]. Mais les «techniques» les plus habituelles pour mal dispenser le sacrement de la Confession sont d'éviter d'en parler, de ne pas encourager les fidèles à y recourir, de diminuer les moments où ils ont accès à des confesseurs, de leur fournir de mauvais confesseurs, etc.

3.4) Le Mariage. Nous sommes témoins que de nombreux couples font de la «figuration en église». Ces couples n'ont ni la foi catholique, ni la moindre intention de respecter les enseignements de l'Église (que ce soit les relations sexuelles pré-maritales, ou la pilule, ou la stérilisation, etc.), ni même souvent la moindre intention d'être fidèle à leur conjoint jusqu'à ce que la mort les sépare! Et pourtant, malgré le fait que c'est interdit, les mauvais prêtres leur accordent le sacrement du Mariage [Code de droit canonique, Nos. 1095.2 et 1101.2, etc.]. Et que dire du cirque qui entoure de tels mariages-bidon! On les organise d'abord et avant tout pour impressionner la parenté, mais celle-ci n'a même pas le droit d'assister à de tels mariages-bidon! [Code de droit canonique N° 1071.4].

3.5) l'Onction des malades. Pas grand chose à signaler ici, sinon que ce sacrement n'est pas pour les malades ordinaires, mais bien pour les malades en danger de mort [Code de droit canonique, N° 1004], et qu'on ne doit pas accorder ce sacrement à ceux qui persévèrent avec obstination dans un péché grave manifeste [Code de droit canonique, N° 1007].

3.6) L'Eucharistie. Les affronts faits à l'Eucharistie sont si nombreux au Québec de nos jours, qu'il serait difficile de tous les énumérer. Répétons au moins qu'il ne faut pas communier en état de péché mortel, et qu'il faut refuser la communion à ceux qui persistent dans un péché grave et manifeste [Code de droit canonique Nos. 916 et 915]. Voir aussi «Le Derby de démolition diocésain», et le «Résumé de l'instruction Redemptionis Sacramentum».

3.7) L'Ordre. Nombreux sont les prêtres au Québec qui sont hérétiques. Or, on aurait dû refuser l'ordination à ces gens [Code de droit canonique, N° 1041.2]. Nombreux aussi sont les prêtres (on en entend parler en particulier aux États-Unis ces temps-ci) qui n'ont pas de bonnes moeurs. Or, ceux-là aussi n'auraient jamais dû être ordonnés [Code de droit canonique, N° 1051.1].

Mais quoi, l'Église aurait-elle donc été fondée par le Dieu-Amour pour refuser les sacrements aux hommes? Pas du tout! C'est que je réfléchis pour savoir si vraiment l'Église au Québec fait une campagne de «désévangélisation». Or, pour fabriquer systématiquement de mauvais produits, il faut avoir un système de contrôle de la qualité totalement déficient. Et quel est le symptôme d'un système de qualité totalement déficient? Tout passe! Rien n'est rejeté! Tout est automatiquement déclaré «conforme aux normes», ou «satisfaisant le standard»!

Faites votre enquête: trouvez des cas où on a refusé d'accorder un sacrement à quelqu'un. Il y en a probablement quelques-uns, mais personnellement, je n'ai jamais entendu parler d'un tel cas au Québec. Je prétends donc que le système de contrôle de qualité de l'Église catholique au Québec est gravement endommagé.

4) La solution: la Charité de la Vérité

Qu'arrive-t-il quand on dispense des sacrements «de mauvaise qualité» en grand nombre? Pour le comprendre, il faut considérer (trop brièvement ici, malheureusement) la nature même d'un sacrement et la condition humaine [CÉC, N° 1131 et suiv.]. La cause de tous les maux sur cette terre est le péché. Que ce soit les guerres, la famine, la discorde, les meurtres, les vols, les viols, la pollution, etc., tout ce qu'il y a de plus mauvais dans ce monde est causé par le péché. Le Christ est venu nous racheter de notre esclavage au péché, par sa passion et sa résurrection. La grâce de Dieu qui nous guérit est dispensée par l'Église dans les sept sacrements, surtout l'Eucharistie. Si on coupe à la source les forces qui sortent du Christ pour nous guérir [Lc 8:46, etc.], on annule d'une certaine manière la Rédemption, et on reconduit l'homme à son dominateur satanique: le péché. Sauf que cette fois-ci, non seulement l'homme est-il pétri de péché, mais en plus il a une grosse étiquette «CATHOLIQUE» estampée sur le front!

Imaginez la campagne de «désévangélisation» épouvantable! On fabrique en grand nombre le pire «produit» imaginable (le pseudo-catholique), et on le distribue partout sur la planète!

La solution à ce problème me semble comporter au moins deux volets: il faut avoir un vrai système de contrôle de qualité (et donc rejeter les «produits» qui ne satisfont pas aux normes), mais parce qu'on «fabrique des produits» qui sont en fait des hommes et non de simples objets, il faut aussi un vrai système d'amélioration de la qualité. En d'autres mots, rehausser le standard, mais aussi donner aux gens les moyens de «sauter plus haut». En effet, on ne peut pas faire comme dans une vraie usine et simplement rejeter au bac de recyclage les produits non-conformes! Comme toujours, on doit garder le juste milieu entre la Justice de Dieu, et son Amour miséricordieux.

Pour avoir un vrai système de contrôle de qualité, plusieurs choses doivent être faites. Une d'entre elles est que certains mauvais prêtres doivent cessent d'aimer leur chèque de paie et leur petit confort personnel, et doivent commencent à aimer leurs paroissiens. En effet, si un prêtre ne nous aime pas assez pour nous dire honnêtement les mauvaises nouvelles, et qu'il est prêt à nous donner un sacrement-bidon rien que pour qu'on lui fiche la paix, alors ce prêtre ne nous aime pas vraiment, et il contredit l'amour que l'Église et Dieu ont pour nous.

Par contre, si on aime vraiment quelqu'un, on est prêt à souffrir (et même mourir) pour son bien. Refuser un sacrement à quelqu'un parce qu'il ou elle n'est pas suffisamment disposé, et ensuite prendre tout le temps et l'effort nécessaires pour l'aider à bien se disposer, c'est de nos jours une des plus grandes preuves d'amour qu'un prêtre puisse donner.

5) L'autre option: le «sacrement de la désévangélisation»

L'autre option serait d'accepter la situation actuelle au Québec comme étant inévitable. On pourrait dans ce cas tout simplement officialiser la pratique courante, peut-être en inventant un huitième sacrement: le sacrement de la désévangélisation.

Seuls les prêtres pourraient recevoir ce nouveau sacrement. Pour le conférer, on imposerait au prêtre une paire de lunettes roses (pour qu'il ne voit pas le péché), et on lui ferait une onction sur les deux bouches. En effet, le mauvais prêtre a deux bouches: une pour dire les enseignements officiels de l'Église quand il est sous enquête par le Pape, et l'autre pour enseigner les hérésies que ses mauvais paroissiens veulent entendre. Cette onction se ferait avec une sorte de saint Chrême moderne: un mélange de mélasse et de cyanure, pour symboliser le «bla-bla béat» toxique qui sort de la bouche de ces mauvais prêtres.

Et bien sûr, ce nouveau sacrement serait dispensé par des agentes de pastorale!

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