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(Semion Shchedrin. La colonne de l'aigle à Gatchina.
[Source])
Comment pourrait-on comparer un pauvre fossoyeur atteint de mongolisme, avec un brillant Docteur en Philosophie et Éthicien de renommée internationale?
La tâche d'un fossoyeur n'est pas bien compliquée. Il doit creuser un fossé ayant deux mètres de profondeur, et suffisamment grand pour laisser entrer un cercueil. Dit d'une manière très crue, il doit faire un trou pour la charogne qui est dans une boîte en bois.
Le pauvre fossoyeur atteint de mongolisme, s'il a suivi son cours de catéchèse, comprend néanmoins de nombreuses choses. D'abord, il comprend que le contenu de la boîte en bois, ce n'est pas une personne humaine.
Ce fossoyeur comprend aussi qu'une fois morte, on ne peut plus faire de bien ou de mal à une personne en tripotant son cadavre. Elle est morte. Son âme spirituelle est séparée de «son corps». Strictement parlant, ce n'est même plus «son corps», mais bien un cadavre. Ce qui fait qu'un tas de matière devient le corps d'une personne, c'est que Dieu créé une âme et «la met dans» ce tas de matière.
Ce fossoyeur a écouté les explications de la bonne religieuse qui enseignait le catéchisme. Il sait donc qu'une fois une personne morte, la seule chose qu'on puisse faire pour son âme, c'est de prier (et le sommet de la prière chrétienne, c'est l'Eucharistie, coeur vivant et essentiel de la Messe).
Voilà pour l'âme de cette personne. Mais que peut-on faire pour ce qui était son corps, c'est-à-dire le cadavre dans la boîte de bois? Rien. Quel que soit l'endroit où le fossoyeur va creuser son trou, il sait que cela ne changera rien pour le cadavre dans la boîte en bois.
Par contre, le fossoyeur sait que la famille du défunt ou de la défunte est encore en vie. La famille, les amis et les connaissances de la personne qui est morte ne sont pas des charognes. Ces gens sont encore tous en vie, et le fossoyeur sait qu'il doit les aimer, et leur parler de Dieu. En effet, la bonne religieuse lui a bien dit que son Baptême lui avait donné une mission prophétique.
Cette expression «mission prophétique» avait bien impressionné notre fossoyeur atteint de mongolisme. Il avait commencé à la comprendre quand la bonne religieuse lui avait dit: «Si tu voyais un commencement d'incendie dans le presbytère, et que tous les autres ne savaient pas qu'il y avait un feu, quelle serait ta mission?» La réponse était venue toute seule, avec un grand sourire: «Tirer sur la grosse manette rouge pour le feu!» Alors la bonne religieuse lui avait fait comprendre qu'il devait dire aux autres comment le feu du péché était mauvais, et comment Jésus était le pompier qui pouvait nous sauver. Il avait compris sa mission.
Notre fossoyeur trisomique, si ses parents étaient très riches, pourrait peut-être décider de répandre la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, en choisissant l'emplacement des trous qu'il creuse.
Il pourrait faire un saut en Irak, ramasser le cercueil d'une fillette morte durant «une attaque aérienne de précision chirurgicale» faite par les troupes étasuniennes, puis aller l'enterrer à New-York, à côté de l'inévitable monstrueux monument à la gloire des innocents morts le 11 septembre 2001, au World Trade Center.
Il pourrait aussi prendre l'avion et aller dans le sud, pour prendre le cercueil d'un pauvre petit garçon qui serait mort dans un bidonville à quelque part en Amérique latine, pour ensuite venir l'enterrer ici, dans le magnifique jardin intérieur d'un de nos immenses et luxueux centres d'achats.
Notre fossoyeur pourrait aussi aller fouiller dans les vidanges d'un avortoir aux États-Unis, où on expédie nos femmes enceintes pour qu'elles puissent tuer leur enfant (au frais du contribuable). Il pourrait ramasser le cadavre du pauvre nouveau-né (ou devrait-on dire «du nouveau-avorté»?), pour le mettre dans un vrai cercueil, et venir l'enterrer à côté de la tombe des grands-parents de cette femme, ici même, dans un cimetière catholique au Québec.
Notre fossoyeur atteint de mongolisme pourrait même, s'il était très brave, aller creuser un grand trou près de la décharge d'une usine qui pollue le fleuve Saint-Laurent, quand on lui demanderait d'aller creuser la tombe d'un riche homme d'affaires, qui durant sa vie auraient fait beaucoup de profits avec cette même usine.
Ce fossoyeur, même trisomique, comprendrait que l'emplacement du trou qu'il creuse peut avoir de profondes répercussions sur toute la société. Peut-être que ce simple fossoyeur, avec sa pelle et son petit cours de catéchèse, pourrait illuminer la conscience morale de son pays, plus que de nombreux Docteurs en Philosophie et Éthiciens de réputation internationale.
«Même la bouche des enfants et des
nourrissons rappelle ta puissance face à l'adversaire,
et remplit de honte l'ennemi et le rebelle.»
[Psaume 8:3,
cité par Jésus dans
Mt 21:16]
Un triste jour, le fossoyeur avait dû creuser un trou pour la bonne vieille religieuse qui lui avait enseigné le catéchisme. Jamais trou ne lui avait semblé si long à creuser, surtout qu'il semblait que plus il creusait la terre, plus il remplissait à mesure le trou avec ses larmes. Ce qui avait fini par le consoler, c'était encore le souvenir de cette religieuse, et de ce qu'elle lui disait durant ses cours de catéchisme.
«Une âme qui meurt en état de grâce va au Ciel», lui disait-elle. Et il savait bien que la bonne religieuse avait tout fait pour vivre et mourir en état de grâce. Elle avait travaillé toute sa vie sans être payée, pour le bien des gens autour d'elle. Elle avait répandu la vérité sur Jésus, dans tous ces cours de catéchèse. Elle avait préparé de nombreux enfants au Baptême, à la Confirmation, à la Confession et à l'Eucharistie. Elle avait respecté tous les Commandements de Dieu, comme Jésus ordonne de le faire [Lc 18:20]. Elle avait elle-même eu recours aux Derniers Sacrements avant sa mort. La confiance en la Miséricorde divine avait fini par sécher les larmes du fossoyeur.
Quelque temps après, le frère de cette vieille religieuse lui aussi était décédé. Sauf que ce frère n'avait pas du tout vécu comme sa soeur religieuse. Il avait tout fait pour publiquement renier sa foi. Il avait vécu publiquement dans l'adultère, et n'avait même pas fait baptiser ses enfants. Avant sa mort, il avait refusé les Sacrements (encouragé en cela par sa famille). Et une fois décédé, sa parenté avait refusé une messe de funérailles, parce que cela «n'avait aucun rapport avec ses croyances ni celle de sa famille».
Mais ce frère voulait une belle cérémonie à la mode dans une belle église catholique (la plus belle, celle qui a la meilleure vue sur le fleuve Saint-Laurent). Et bien sûr, il voulait se faire enterrer à côté de la vieille religieuse, car ça paraît bien, se faire enterrer dans un cimetière catholique, à côté de gens qui sont morts en odeur de sainteté.
Arrivé à la messe, notre fossoyeur trisomique chercha en vain Jésus réellement présent dans l'Eucharistie. «C'est une fable! C'est de la magie! Et d'ailleurs Dieu est mort, et le Pape n'est pas le Vicaire du Christ!» lui dirent les gens qui étaient là, en se moquant copieusement de lui.
Par la suite, quand on lui ordonna de creuser un trou juste à côté de la tombe de sa vieille religieuse, notre fossoyeur trisomique leur dit:
«Non. Creusez-le tout seul votre trou.»
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