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Note: Pour la correspondance concernant cette lettre, voir M. Olivier Moreau, M. Jean-Sébastien Trudel, et aussi la lettre au Cardinal Marc Ouellet.
Sur mon site web, il est très rare que j'enlève un texte. Il est encore plus rare que je remette un texte que j'ai enlevé. Ce texte-ci a bien dû être enlevé et remis trois fois, alors ça vous donne une idée.
Je l'ai remis (pour l'instant!) pour les raisons suivantes:
- Ce qu'il raconte est vrai, à ma connaissance.
- La situation qu'il décrit est très fréquente au Québec de nos jours, et de nombreux catholiques sont confrontés à de telles situations familiales.
- Plusieurs personnes m'ont dit que ce texte les avait touché.
- Si j'essaie de condamner le mal, je dois le condamner partout où j'ai l'impression de le voir, pas seulement chez mes ennemis.
Certaines personnes m'ont dit que, dans ce texte, «tu envoies ta propre soeur en Enfer!» C'est faux. Primo, c'est probablement une hérésie de prétendre savoir qui est, et qui n'est pas en Enfer. Secundo, je prie pour ma soeur Élizabeth deux fois par jour, ce que je ne ferais pas si je pensais que tout était déjà perdu.
Chère Agathe,
Il y a onze jours, ta mère Élizabeth Jetchick décédait du cancer. C'est dur de perdre sa mère quand on a seulement treize ans. Tout le monde l'aimait bien, notre «Zaza»! Mais alors, pourquoi ne suis-je pas venu ni aux cérémonies ni à l'enterrement de ma propre soeur?
Était-ce parce que je n'aimais pas ta mère? Non. Tu sais bien que je suis venu plusieurs fois à Ottawa pour aider Élizabeth. Tu sais peut-être aussi que quand toi, ton père Laurent et moi sommes arrivés dans la chambre d'hôpital d'Élizabeth, et que nous l'avons trouvé morte, je me suis mis à genoux sur le plancher au chevet de ta mère, j'ai dit un «Notre Père», et ensuite j'ai fait le signe de la croix sur son front, en disant «Au Nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit», exactement comme faisait ta grand-mère Marie-José, lorsqu'elle mettait ta mère Élizabeth au lit quand elle était petite.
Non, ce n'était pas par manque d'amour que j'ai refusé de venir. C'était pour éviter de causer un scandale en participant à une hypocrisie de groupe et un mensonge collectif.
Suis-je fou? D'une certaine manière, je le souhaite ardemment, car cela voudrait dire qu'il n'y aurait jamais eu «d'hypocrisie de groupe et de mensonge collectif». En tout cas, si tu n'es pas d'accord avec ce que je vais dire, prends cette lettre non comme une tentative de te blesser, mais bien comme un appel à l'aide.
Peut-être que tu ne sais pas ce qu'est un «scandale». Imagine alors qu'il y a un grand trou dehors, et que tous les gens qui tombent dedans en meurent. Si toi tu voyais le trou avant les autres, tu mettrais sûrement un de ces gros «cônes orange» devant pour que les gens l'évitent! Je sais que tu ne ferais jamais ça Agathe, mais si tu enlevais le «cône orange» et que tu cachais le trou avec des feuilles mortes pour que plus de gens tombent dedans, alors on dirait que tu serais une «cause de scandale». En d'autres mots, tu encouragerais les gens à se blesser et même à mourir. Tu vois bien qu'un scandale, c'est quelque chose de très, très mauvais!
Mais alors, comment peut-on encourager les gens à se blesser et même à mourir, tout simplement en allant dans une église et en enterrant quelqu'un au cimetière?
Pour comprendre cela Agathe, tu dois savoir que les hommes ne sont pas comme les chiens, les chats, ou les fourmis. Les hommes ont une âme spirituelle, créée immédiatement par Dieu au moment de la conception, et cette âme ne cesse jamais d'exister. Lorsque notre corps meurt, notre âme va soit au Ciel, soit au Purgatoire, soit en Enfer. Aller au Ciel, c'est rigolo et agréable, parce qu'on est avec Dieu et les saints, et qu'on est parfaitement heureux pour l'éternité. Aller en Enfer, c'est pas rigolo du tout, parce qu'on est séparé de Dieu et des gens qu'on aime, et qu'on brûle dans le feu pour toujours. Aller en Enfer, c'est comme tomber dans le trou dont je te parlais pour expliquer le scandale.
Pour tomber dans un trou, il faut trébucher, mais pour tomber en Enfer, il faut commettre ce qu'on appelle un «péché mortel». Pour comprendre un peu ce qu'est un péché, tu peux lire un petit essai sur la Morale. Mais crois-moi, un péché «mortel» est un péché suffisamment grave pour tuer la vie de la grâce de Dieu dans notre âme.
Mais alors quelle est cette hypocrisie de groupe et ce mensonge collectif? Ce que je vais maintenant dire est dur, mais selon moi c'est vrai. Agathe, longtemps avant que le corps de ta mère ne soit tué par le cancer qui rongeait son cerveau, je pense que la vie de la grâce de Dieu dans l'âme d'Élizabeth se faisait étouffer par certains membres de ma famille. En d'autres mots, ta mère a d'une certaine manière été euthanasiée spirituellement, bien avant que son coeur ne cesse de battre.
Est-ce qu'une «euthanasie spirituelle» est quelque chose qui concerne le Droit criminel? Non bien sûr, on parle d'un concept de théologie catholique ici [Summa Theologica, I-II, q. 88, a. 1].
Je crois sincèrement que ces membres de ma famille agissaient non pas par méchanceté, mais bien par ignorance. Mais ma conscience me dit que si j'avais été aux cérémonies et à l'enterrement de ta mère sans rien dire, cela aurait été comme si j'avais enlevé le «cône orange» et que j'avais caché le trou avec des feuilles mortes.
Comment peut-on contribuer à faire une «euthanasie spirituelle»? Il y a plusieurs moyens, mais je vais me limiter à quelques-un ici:
1) Ridiculiser la religion catholique. Dis-moi, Agathe, as-tu déjà entendu parler en bien du catholicisme, par les membre de ma famille? As-tu déjà reçu des cours de catéchèse? As-tu entendu parler de Jésus, du Pape, de l'Eucharistie, de la Sainte Vierge?
2) Ne pas dénoncer le concubinage. Pour un baptisé (et ta mère était baptisée), vivre en concubinage est vivre en état de péché mortel continuel. Or mourir en état de péché mortel fait que Jésus nous dit au jour de notre mort: «Allez loin de moi, maudits, dans le feu éternel, préparé pour le diable et ses anges!» [Matthieu, 25, 41]. Combien de membres de ma famille ont dénoncé cette situation?
3) Ne pas dénoncer le mariage civil pour un catholique. Pour un baptisé, se marier ailleurs que dans l'Église, même si le mariage est conclu en vertu de la loi civile, n'est rien d'autre qu'un concubinage honteux et funeste. [Denzinger, N° 2991]
4) Ne pas faire baptiser son enfant. L'Église ne connaît pas d'autre voie pour ouvrir aux enfants un accès certain au Ciel que le Baptême, et faire baptiser son enfant est une obligation grave. [Denzinger N° 4671-4673]. Une mère catholique qui ne fait pas baptiser son enfant commet un péché grave.
5) Décourager quelqu'un à se préparer à la mort. Six mois avant la mort d'Élizabeth, on savait, qu'à moins d'un miracle, elle allait mourir. Son cancer était d'un type très virulent, et rien dans la science médicale permettait de le guérir, selon les sources les plus autorisées [Harrison's Principles of Internal Medicine, 14th Edition, p. 2400]. A-t-on encouragé ta mère à se préparer chrétiennement à la mort, ou a-t-on au contraire tout fait pour détourner son attention du moment le plus important de sa vie? Tu sais comme moi que la mort a surpris Élizabeth «comme un voleur dans la nuit» [Lc 12:39-40].
6) Détourner quelqu'un des derniers sacrements. L'Église catholique dispose de puissants remèdes pour l'âme, et c'est le devoir de la famille d'encourager une personne en danger de mort de recevoir les derniers sacrements [CÉC, N° 2299]. Si tu savais Agathe, les insultes et les menaces que j'ai dû endurer pour aller dire à ta mère de recevoir les derniers sacrements!
7) Détourner quelqu'un de la messe catholique. Ton oncle Barry a été le premier à trouver une cérémonie religieuse après la mort de ta mère. Il lui a organisé une messe catholique à la belle basilique de Saint-Patrick à Ottawa. Non seulement certains membres de ma famille ont-ils encouragé ton père à refuser cette messe, mais ils ont même refusé de l'annoncer dans le journal, lui préférant une cérémonie-bidon dans une église qui n'est même pas chrétienne (l'Église Unitarienne).
La mort de ta mère n'est pas drôle, Agathe, mais il y a une chose qui m'a presque fait rire: l'apparente hypocrisie de certains membres de ma famille. Ces gens sont ceux qui hurlent de rage et qui poussent des cris de protestation en lisant les sept paragraphes précédents. Des gens qui ont une mauvaise opinion de la religion catholique. Pourtant, ces gens sont ceux qui ont le plus insisté pour qu'Élizabeth soit enterrée dans un cimetière catholique! C'est comme si des gens enterraient leurs morts dans un cimetière Nazi, tout en condamnant vertement l'anti-sémitisme! Leur position me semble plutôt incohérente.
Je comprends très bien qu'il y ait des gens qui refusent les enseignements officiels de l'Église catholique. Nous sommes dans un pays libre, et les gens peuvent adorer Dieu comme bon leur semble (étant sauve la protection du bien commun). Par contre, même si on n'est pas catholique, il faut tout de même éviter l'hypocrisie et le mensonge. En effet, l'amour de la vérité est le pré-requis indispensable pour trouver Dieu. Si on ne déteste pas le mensonge, on est dans un trou, et on n'en sortira jamais.
Agathe, ta mère a été euthanasiée spirituellement. Tu n'as peut-être que treize ans, mais tu es assez vieille pour comprendre que ce n'est pas bien.
Agathe, va porter cette lettre aux membres de ma famille d'Élizabeth, et pose-leur des questions. Tu as le droit d'avoir des réponses.
Lance-leur un défi. Demande-leur s'ils sont catholiques. Explique-leur que pour être catholique, il ne suffit pas d'avoir un certificat de Baptême, mais il faut aussi et surtout croire tout ce que la sainte Église catholique croit et enseigne. S'ils sont catholiques, demande-leur pourquoi ils ont rien fait pour aider Élizabeth à se préparer chrétiennement à la mort. Demande-leur pourquoi ils ne te parlent jamais de leur religion. Demande-leur pourquoi ils ne professent pas leur foi publiquement.
Et si ces gens-là te disent qu'ils ne sont pas catholiques, demande-leur pourquoi ils n'envoient pas une lettre à l'évêque pour lui dire par écrit qu'ils rejettent leur foi catholique. Cela serait une démarche honnête. As-tu vu des pierres tombales érigées pour des protestants ou des Témoins de Jéhovah dans le cimetière où on a enterré ta mère? Non, car ces gens-là ont eu le courage de dire ce qu'ils pensaient être la vérité. Ils sont enterrés ailleurs que dans un cimetière catholique, mais au moins ils sont ensevelis dans la vérité et la franchise, et Dieu va tenir compte de cela au Jour du Jugement dernier.
Dieu t'aime Agathe, et Dieu veut que tu rendes service à toute ma famille. Va porter un «cône orange» devant le trou.
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