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La Bible peut être utilisée pour tenter de justifier toutes sortes de choses injustifiables. Elle a été utilisée pour tenter de justifier l'esclavage, alors que d'autres on essayé de justifier l'utilisation des drogues psychotropes en utilisant divers passages de l'Ancien Testament, etc. Ce n'est pas du tout une preuve que l'Écriture Sainte est d'une certaine façon erronée, ou qu'elle est autre chose que la Parole de Dieu. Plutôt, c'est une preuve que l'homme peut «mettre dans la bouche» de l'Écriture Sainte ce qu'il a envie de dire.
Même Satan cite l'Écriture Sainte, et en le faisant, il en abuse, en la tordant pour servir ses propres fins [Mt 4:1-11]. Mais toutes les mauvaises interprétations de l'Écriture ne recouvrent pas nécessairement un monde de malice. Certaines fausses lectures sont peut-être même bien intentionnées, mais aucune d'entre elles n'est parfaitement sans danger.
Une fausse interprétation de l'Écriture Sainte de ce genre concerne la septième béatitude: «Bienheureux les artisans de paix, ils seront appelés enfants de Dieu» [Mt 5:9]. Certaines personnes ont commencé à interpréter ce passage d'une manière qui justifie une approche à la résolution de conflit qui est absolument conciliatoire, une attitude qui inclut une disponibilité à étendre la portée du compromis beaucoup plus loin que ce que la justice semblerait permettre, dans le seul but d'éviter le conflit à tout prix. Toute personne qui n'adopte pas cette position de conciliation à tout prix est perçue comme un artisan, non pas de paix, mais de discorde.
Mais une telle interprétation ne peut pas possiblement être correcte, car elle entre en conflit avec l'exemple vivant du Christ lui-même. Car Il a dit: «Ne croyez pas que je sois venu apporter la paix à la terre. Je ne suis pas venu amener la paix mais l'épée. Je suis venu pour créer la division: on sera contre son propre père, la fille s'opposera à sa mère et la jeune mariée à sa belle-mère. Chacun aura pour ennemis les gens de sa maison» [Mt 10:34-36].
Jésus ne peut pas vraiment être considéré comme immanquablement conciliant: «Malheur à vous, gens de la Loi et Pharisiens hypocrites ! Vous fermez aux autres le Royaume des Cieux ; vous-mêmes n'y entrez pas, et quand un autre est sur le point d'y entrer, vous l'en empêchez ! [...] Malheur à vous, guides aveugles!» [Mt 23:13, 16]. Ou considérez le discours sur le Pain de Vie: «"[...] celui qui mange ce pain vivra pour toujours". Voilà ce que Jésus a dit dans la synagogue, quand il enseignait à Capharnaüm. Après l'avoir entendu, bon nombre de ses disciples dirent : "Ce langage est dur à accepter, qui voudra l'écouter ?" [...] Ce jour-là beaucoup de disciples firent marche arrière et cessèrent de le suivre.» [Jn 6:58-60, 66].
La réconciliation à tout prix permet souvent à des conditions menaçantes et dangereuses de se développer dans une communauté, et à cause de cela, elle n'atteint pas la justice et est donc irresponsable. Le but premier d'une communauté n'est pas la «paix» dans le sens d'une absence de tracas, mais «paix» dans le sens d'une unité ou harmonie réelle comme d'une condition pour le bien de chaque membre de la communauté. C'est cette dernière signification qui s'accorde avec la signification d'origine du «shalom» hébreux; de saluer une personne avec «Salaam» est de lui souhaiter tout ce qui concourt à son bien le plus élevé, pas seulement l'absence de tracas.
La distinction est importante, car le bien le plus élevé de l'homme n'est pas l'absence de conflit, mais la possession de Dieu dans la Vision béatifique. Un artisan de paix est quelqu'un qui fait tout pour le bien le plus élevé de son voisin, en travaillant à établir toutes les conditions qui mènent à ce but.
Or l'Église est le principal moyen pour atteindre ce but, car le Christ l'a établie pour notre salut: «Alors Jésus s'approcha et leur dit: "Tout pouvoir m'a été donné au ciel et sur la terre. Allez donc et faites-moi des disciples de toutes les nations. Vous les baptiserez au nom du Père et du Fils et de l'Esprit Saint, et vous leur enseignerez, pour qu'ils l'observent, tout ce que je vous ai ordonné. Voici que je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin du temps"» [Mt 28:18-20]. Les Sacrements, les sacrementaux, la liturgie, le droit canon et l'enseignement de l'Église, tout cela existe en vue du salut de l'homme.
Mais L'Église est un corps vivant, le Corps mystique du Christ, et un corps vivant est caractérisé par l'unité, alors qu'au contraire il appartient au cadavre de se décomposer. C'est pourquoi ceux qui choisissent d'être des dissidents par rapport à l'enseignement établi de l'Église, et ceux qui sont engagés à semer les graines de la dissidence, tels que les professeurs employés par des institutions éducatives catholiques, sont tout sauf des artisans de paix. Pas plus que les chefs qui les tolèrent au nom de la «paix». Un personnel composé de dissidents radicaux et de gens fidèles à l'enseignement du Magistère - et tout ce qui se retrouve entre ces extrêmes - n'est pas une communauté, mais une société divisée qui ne peut pas atteindre son propre but. Pendant qu'une personne construit, une autre démolit, alors qu'un autre groupe ne fait que regarder, complètement indifférent d'une manière ou de l'autre.
L'artisan de paix veut amener une unité réelle et véritable dans l'Église, pas dans le monde ou avec le monde - car cela est impossible. Alors il vise, entre autre chose, l'élimination de la dissidence illégitime, qui est le genre de dissidence fondée sur des principes incompatibles avec les principes catholiques, comme par exemple les principes du Relativisme post-moderne, ou du Marxisme, ou du Rousseauisme, etc.
Mais les chefs qui tolèrent de telles divisions dans une institution catholique, sous la bannière de la diversité des points de vue, de la liberté, de la tolérance, etc., se bernent eux-mêmes; car ils substituent le bien réelle de l'unité ecclésiale pour un des aspects empiriques de l'unité, c'est-à-dire le sentiment et l'apparence d'une communauté unifiée. La situation est comparable à un chirurgien qui refuse de faire une opération, par crainte de déranger la «paix» du corps d'une personne, qui est déjà gravement infecté par une maladie.
Cachée derrière l'approche de la conciliation absolue, de la conciliation à tout prix, il y a une conception Rousseauiste de la personne humaine, qui présume que nul n'est influencé par le Péché originel, que tout le monde est naturellement bon, et que le conflit et la division ne sont pas enracinés dans le coeur pécheur de l'homme, mais dans les conditions environnantes et dans les malentendus.
Mais même si certains conflits peuvent bien être causés par les malentendus qui peuvent être résolus par un dialogue honnête et ouvert, cela n'explique pas tout, loin de là. L'anthropologie Rousseauiste est tout simplement incompatible avec la comception judéo-chrétienne de la personne. Le mal est réel, et il trouve son origine dans le coeur, pas dans l'environnement: «Car du coeur sortent les intentions malveillantes» [Mc 7:21]. Et tout le monde n'a pas de bonnes intentions: «Si le monde vous déteste, pensez qu'il m'a détesté avant vous. Si vous étiez du monde, le monde reconnaîtrait les siens et les aimerait. Mais vous n'êtes pas du monde, et le monde vous déteste parce que je vous en ai tirés» [Jn 15:18-19].
En effet, la diplomatie, la circonspection, le tact, la prévoyance et la prudence sont toutes des parties intégrales de la butance, et les bons chefs doivent agir avec butance. La bonne gestion de conflit est subtile, patiente, professionnelle, souple, et attentive à minimiser les conséquences négatives possibles des bonnes décisions, et ouverte à compromettre ce qui peut être compromis, sans enfreindre les principes de la justice et donc sans risquer les âmes des autres. Mais «Qui n'est pas avec moi est contre moi, qui ne rassemble pas avec moi disperse» [Lc 11:23], et celui qui disperse joue avec les âmes. La tolérance, dans ce cas, n'est pas une vertu, mais l'antithèse même de la septième béatitude.
Copyright © 2006 Douglas McManaman. Traducteur: SJJ
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