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L'abbé Guy Pagès a rendu service à la Chrétienté en publiant cet essai sur l'existence, la raison d'être et la population de l'Enfer. En effet, pourquoi travailler à accomplir son salut «avec crainte et tremblement» [Ph 2:12], si l'enfer n'existe pas? «Si la foi en l'existence de l'enfer est le revers de la médaille donnant accès au Paradis, là où manque le revers de la médaille, là manque aussi nécessairement la médaille elle-même» (p. 15) De plus, «si même Judas est en Paradis, alors qui n'y sera pas? Il n'y a donc pas tant de soucis à vous faire pour votre salut! Continuez à pécher braves gens, le diable s'occupe de tout!» (p. 16)
Je m'excuse d'avance pour les nombreux défauts de ce résumé. Entre autres, il y a une masse de citations du Magistère, des Pères de l'Église et des saints dans ce livre de 220 pages, que je ne peux tout simplement pas compresser dans mon petit article. De plus, selon moi, ce livre a quelques imperfections, mais j'imagine qu'elles disparaîtront dans une deuxième édition.
«Regardez-moi danser sur la ligne entre l'hérésie et le catholicisme!»
(Septimus Edwin Scott. Ballet.
[Source])
Balthasar (1905-1988), prêtre et théologien suisse, a failli devenir cardinal sous Jean-Paul II. Il est considéré par plusieurs comme un des grands théologiens du XXe siècle. L'abbé Pagès examine deux de ses derniers livres, Espérer pour tous et L'enfer une question. De nombreux passages de ces livres «dansent sur la ligne» entre la Foi catholique et l'hérésie. Balthasar aimerait bien que l'enfer n'existe pas, ou du moins qu'il soit vide, ou «vidable»!
Balthasar est-il hérétique? Je n'ai pas lu ses livres, et je ne suis pas le Pape. Par contre, en suivant l'analyse serrée de l'abbé Pagès, je ne peux m'empêcher de penser à tous ces théologiens enrageants que j'ai étudié. Enrageants parce que toujours empressés de se dire «catholiques», toujours trop occupés pour énumérer les déclarations du Magistère qui les contredisent, toujours enflammés de beaux sentiments à la mode (qui, comme par hasard, se heurtent à la vérité de Foi qui les dérange), jamais honteux de citer la Bible de manière sélective, et surtout, toujours très à l'aise en tutu et chaussons de ballet, quand vient le temps d'être d'un côté et/ou de l'autre de la ligne, simultanément et sous le même rapport!
En gros, Balthasar n'aime pas la distinction entre la Rédemption objective, et la Rédemption subjective. Prenons une métaphore. Un bateau est en train de couler en plein milieu de l'océan, et tous les passagers vont donc se noyer. Ils sont tous perdus. Survient une bonne barque de sauvetage, solide, confortable, et assez grande pour tous. Du coup, tous les passagers peuvent éviter la noyade! C'est la «Rédemption objective». Mais chaque passager doit ensuite vouloir embarquer dans la barque («Rédemption subjective»). Un passager qui refuse librement d'embarquer va se noyer, même si la barque est là, devant lui.
À cause de cette distinction, on peut trouver dans la Bible deux sortes de passages sur le salut, ceux qui parlent de «tous» les hommes (Rédemption objective, [Tt 2:11; 1Tm 2:1; Jn 12:32; Rm 5:18; etc.]), et ceux qui disent «certains, pas tous» (Rédemption subjective, [Mt 22:14; Mt 13:49-50; etc.]).
Balthasar a-t-il été contaminé par l'erreur philosophique populaire du pragmatisme? En tout cas, il semble bien se défier du savoir (surtout celui de saint Augustin, de saint Thomas d'Aquin et du Magistère), et semble attribuer beaucoup d'importance à sa propre bonté et ses émotions de compassion pour les damnés. De plus, Balthasar se rend-il vraiment compte que comme la Foi vient de Dieu, qui ne peut tromper ou être trompé, si un seul morceau de la Foi catholique est faux, toute la Foi catholique est fausse?
Je n'entrerai pas plus dans les détails de la solide critique de Balthasar faite par l'abbé Pagès. (Vous pouvez aussi lire une critique similaire de Balthasar faite par Fr. Regis Scanlon, OFM Cap., intituée The Inflated Reputation of Hans Urs von Balthasar, anglais seulement). Souvenez-vous au moins que ce Balthasar n'est pas la Parole de Dieu, et que la Parole de Dieu contredit ce Balthasar. (Pour autant qu'il arrête de danser!)
«La vie divine (à laquelle nous sommes appelés et pour laquelle nous avons été créés) n'est pas le prolongement nécessaire de notre existence terrestre. Elle ne nous est pas due... Nous ne sommes pas Dieu!» (p. 71)
«Le développement dogmatique va de mieux en mieux montrer que l'espérance d'une rétribution, d'une récompense, est l'acte d'une vertu authentiquement surnaturelle et théologale, et que, même chez un chrétien parfait, il y a toujours légitimement place non seulement pour le désir du Ciel mais aussi pour la crainte de l'enfer.» (p. 73, «conduisez-vous avec crainte pendant le temps de votre exil» [1P 1:17])
«Ni les religions du paganisme, ni les mythologies, ni les philosophies» n'ont connu l'existence de l'enfer. «Dans le christianisme même, toutes les tentatives de rationalisation du dogme ont abouti à le nier. Impuissante à découvrir l'enfer, la raison ne peut pas le comprendre. Nous ne savons l'existence de l'enfer que par la Révélation. Que Dieu ait créé pas seulement la plus grande partie des hommes, mais même un seul d'entre eux en sachant qu'il se damnera, est un profond mystère - qui ne doit pas nous faire douter de l'absolue bonté de Dieu, mais seulement nous conduire à reconnaître la gravité, le sérieux, la réalité de Son amour pour chacun», et la réalité de notre liberté. (p. 75)
«L'enfer, c'est le péché non expié et non expiable en l'autre vie. La cause efficiente, au sens large, qui a produit l'état de choses qui exige l'enfer, c'est le pécheur par son péché et lui seul... Le péché est le mépris et le rejet de Dieu et de Sa loi d'amour (de la Loi naturelle dont le Décalogue est le résumé, et de l'Évangile qui en est la perfection), le rejet de l'Amour infini se donnant à nous.» (p. 84)
«Tandis que les Élus se réjouissent sans fin d'être les heureux bénéficiaires d'une miséricorde imméritée, les damnés qui n'en ont point voulu se lamentent éternellement d'en être justement privés. Ainsi s'accomplit l'Écriture: «Ce que redoute le méchant lui échoit, tandis que ce que souhaite le juste lui est donné». [Pr 10:24]» (p. 87)
«Il faut bien comprendre que l'enfer n'est pas quelque chose de semblable au Paradis, comme une glace à la myrtille est semblable à une glace au chocolat. Comme cela est vrai de toutes les réalités négatives, l'enfer n'a pas d'être en soi: il est la perte du Paradis! Ce qui est quelque chose, c'est le Paradis. L'enfer n'existe que depuis que le père du Mensonge a réussi à nous persuader que tout aussi vrai que nous pouvons choisir légitimement entre la glace à la myrtille et la glace au chocolat, nous pouvons choisir tout aussi légitimement entre le Paradis et l'enfer... Cependant, choisir l'enfer, c'est choisir de ne pas choisir le Paradis! Erreur fatale! ... Rien d'autre! D'où les pleurs dont parle Jésus sur la perte irrémédiable du seul vrai bien d'une valeur infinie, et les grincements de dents provoqués par la rage de s'être laissé tromper.» (p. 89)
«Le principe de l'inégalité des supplices infernaux tient à ce que l'enfer suit le péché comme l'ordre à rétablir suit le désordre et se mesure évidemment sur lui. Donc tel péché: tel enfer! Cela tant pour la peine du dam [la privation du Créateur] que pour les peines du sens [pour l'usage désordonné de la créature].» (p. 93)
«Puisque l'enfer est éternel, prier pour les damnés est non seulement vain, mais impie. Les damnés ne sont pas de pauvres malheureux, mais des ennemis de Dieu, remplis de la haine la plus noire, de l'ingratitude et de tous les vices les plus affreux, et cela de leur propre volonté! Ils n'ont que le sort qu'ils ont eux-mêmes voulu dans leur dépravation injustifiable et leur obstination finale. Les Bienheureux, comme Dieu lui-même, n'ont pour les damnés aucune compassion, car la vrai compassion suppose un mal guérissable, ce qui dans leur cas n'est plus possible. Ils ne sont là que comme témoins éternels des grâces dont Dieu nous a comblés et du malheur dont le Christ nous a délivrés... À Lui la louange et la gloire, l'action de grâce et l'amour, pour l'éternité! Amen!» (p. 94)
«[Les] hommes qui refusent Dieu et Son amour infini voient déjà sur la terre leur existence se transformer peu à peu en un enfer. Les limites de leur existence privée de la communion à la Transcendance divine, tel les anneaux d'un serpent les serrant sur eux-mêmes, finissent par les étouffer...» (p. 94)
«Se débattre dans l'horreur noire où seul s'illumine, au réverbère de l'esprit brûlant, le nom du péché qui leur a valu d'être plongés dans une telle horreur! Ne trouver aucun appui dans ce remue-ménage d'âmes qui se haïssent et se nuisent mutuellement, si ce n'est dans le désespoir qui les rend folles et toujours plus maudites. S'en nourrir, s'appuyer sur lui, se tuer avec lui. La mort nourrira la mort, est-il dit. Le désespoir est mort et nourrira ces morts pour l'éternité.»
«Notons que pour un chrétien damné, les caractères sacramentels du Baptême, de la Confirmation et de l'Ordre demeurent en lui comme les signes éternels des hauteurs d'où il a été, par sa faute, déchu... comme les marques de son ignominie, et les preuves de sa plus grande scélératesse.» (p. 97)
«Pour comprendre la raison de l'éternité de l'enfer pour un péché qui n'a duré qu'un instant, impliquerait de comprendre ce qu'est la malice infinie du péché et l'Amour infini dont il est le rejet.» (p. 105)
«Le petit nombre de sauvés dans l'Arche de l'Alliance de Noé est la figure du petit nombre de sauvés à travers les eaux du Baptême dans l'Église, comme aussi des Hébreux à la suite de Moïse à travers des eaux de la Mer Rouge. La Révélation enseigne sans fard que tous ne seront pas sauvés, et que cela sera même seulement le sort d'un «reste» [Mt 7:13; Lc 13:24; Rm 9:27; Rm 11:5; [...] etc.], un «petit troupeau»... «Ainsi parle YHWH: Comme un berger sauve de la gueule du lion deux pattes ou un bout d'oreille, ainsi seront sauvés les enfants d'Israël» [Am 3:12] [...] «Beaucoup sont appelés mais peu sont élus» [Mt 22:14]. «Beaucoup, je vous l'ai dit souvent et je vous le redis aujourd'hui avec larmes, se conduisent en ennemis de la Croix du Christ: leur fin sera la perdition!» [Ph 3:18]» (p. 107)
Nombreux sont les théologiens modernes qui canonisent Judas, en se servant de techniques encore moins subtiles que celles de Balthasar. «Ainsi, bien que Jésus rappelle que «l'Écriture ne peut être récusée» [Jn 10:35], Hans-Joseph Klauck se croit néanmoins autorisé à ne pas «prendre pour argent comptant les récits du Nouveau Testament».» (p. 122)
À cela, Benoît XVI, dans son livre Jésus de Nazareth, pourrait répondre: «Les pires livres qui détruisent la figure de Jésus, qui démolissent la Foi, ont été écrits avec de prétendus résultats de l'exégèse. [...] L'interprétation de la Bible peut effectivement devenir un instrument de l'Anti-Christ.» (p. 127).
«Pour qu'une affirmation soit reconnue de Foi divine et catholique, elle doit recevoir le témoignage des trois sources de la Foi que sont l'Écriture, la Tradition de l'Église et l'enseignement de son Magistère.» (p. 131)
«A) Dans l'Écriture Sainte, Jésus a - et par trois fois, formellement annoncé la damnation de Judas. [Jn 6:70; Mt 26:24; Jn 17:12]» (p. 131)
«B) La Tradition témoigne de la Foi de l'Église en la damnation de Judas. (1) L'Église célèbre la fête de chaque Apôtre, Elle ne fête pas et n'a jamais fêté celle de Judas... C'est la preuve qu'Elle a toujours cru qu'il n'était pas en Paradis. (2) Sachant que Judas n'était pas en Paradis, l'Église n'a jamais non plus prié pour qu'il y aille... c'est la preuve qu'Elle a toujours cru qu'il n'était pas non plus au Purgatoire.» (p. 134)
«C) Le Magistère de l'Église enseigne aussi que Judas est en enfer. Saint Pierre, le premier Pape, dans l'exercice de son magistère universel et infaillible, lors du premier synode des évêques réunis par et sous son autorité suprême, enseigne que Judas «est allé dans son lieu à lui» [Ac 1:25]» (p. 134) De plus, trois passages du Catéchisme du Concile de Trente (le Magistère ordinaire) disent que «Judas n'a pas profité de la Rédemption et qu'il a perdu son âme» (p. 135)
«À cause de l'interprétation fallacieuse à laquelle donnent prise les affirmations dogmatiques de l'Église au sujet de l'enfer, il n'a pas été difficile à un esprit d'insouciance, de folle présomption, et bientôt de totale incrédulité puis d'impiété, de se développer... pour le plus grand tort fait à tant d'âmes! Comment ne pas reconnaître que nous nous trouvons dans un cas typique où un changement de mentalité appelle un enseignement adapté? Aujourd'hui, l'opinion du salut universel s'est répandu à un tel point, même dans l'Église (cf. par exemple les canonisations systématiques lors des enterrements!) que seule une intervention du Magistère paraît pouvoir y faire front! La plupart des définitions ne sont-elle pas d'ailleurs point nées à la suite de telles crises d'orthodoxies?»
«C'est pour stopper ce mal absolu de la damnation de trop d'âmes que, conformément à l'enseignement constant de la Sainte Écriture, des Pères de l'Église, et du Magistère, nous demandons au Magistère suprême de l'Église la proclamation d'un nouveau dogme affirmant la présence actuelle de nombreuses âmes en enfer, dont celle de Judas.» (p. 139)
«En notre temps où de plus en plus de personnes, contaminées par le New-Age, se mettent à la recherche de leur propre Déité, tandis que d'autres pensent encore qu'après la mort il n'y a rien, et que bon nombre de chrétiens, persuadés que le péché n'étant pas si grave - puisque Dieu est si bon qu'Il fera bien en sorte que "l'on ira tous au Paradis", vivent comme si Dieu n'existait pas, est-ce que la définition dogmatique proposée ne serait pas un réel service à leur offrir?» (p. 143)
Correspondance reliée à cet article (surtout d'admirateurs de Hans Urs von Balthasar):
Plusieurs autres citations sur le petit nombre des élus référencées ici [Irons-nous tous au Paradis?].
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