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Catéchisme de l'Église catholique -- §1800 à §1899

§1800
L'homme doit toujours obéir au jugement certain de sa conscience.

§1801
La conscience morale peut rester dans l'ignorance ou porter des jugements erronés. Ces ignorances et ces erreurs ne sont pas toujours exemptes de culpabilité.

§1802
La Parole de Dieu est une lumière sur nos pas. Il nous faut l'assimiler dans la foi et dans la prière, et la mettre en pratique. Ainsi se forme la conscience morale.

Article 7) Les vertus

§1803
«Tout ce qui est vrai, tout ce qui est digne, tout ce qui est juste, tout ce qui est pur, tout ce qui est aimable, tout ce qui a bon renom, s'il est quelque vertu et s'il est quelque chose de louable, que ce soit pour vous ce qui compte» (Ph 4:8).

La vertu est une disposition habituelle et ferme à faire le bien. Elle permet à la personne, non seulement d'accomplir des actes bons, mais de donner le meilleur d'elle-même. De toutes ses forces sensibles et spirituelles, la personne vertueuse tend vers le bien; elle le poursuit et le choisit en des actions concrètes.

Le but d'une vie vertueuse consiste à devenir semblable à Dieu.
(S. Grégoire de Nysse, beat. 1: PG 44, 1200D)

I. Les vertus humaines

§1804
Les vertus humaines sont des attitudes fermes, des dispositions stables, des perfections habituelles de l'intelligence et de la volonté qui règlent nos actes, ordonnent nos passions et guident notre conduite selon la raison et la foi. Elles procurent facilité, maîtrise et joie pour mener une vie moralement bonne. L'homme vertueux, c'est celui qui librement pratique le bien.

Les vertus morales sont humainement acquises. Elles sont les fruits et les germes des actes moralement bons; elles disposent toutes les puissances de l'homme à communier à l'amour divin.

Distinction des vertus cardinales

§1805
Quatre vertus jouent un rôle charnière. Pour cette raison on les appelle «cardinales»; toutes les autres se regroupent autour d'elles. Ce sont: la prudence, la justice, la force et la tempérance. «Aime-t-on la rectitude? Les vertus sont les fruits de ses travaux, car elle enseigne tempérance et prudence, justice et courage» (Sg 8:7). Sous d'autres noms, ces vertus sont louées dans de nombreux passages de l'Écriture.

§1806
La prudence est la vertu qui dispose la raison pratique à discerner en toute circonstance notre véritable bien et à choisir les justes moyens de l'accomplir. «L'homme avisé surveille ses pas» (Pr 14:15). «Soyez sages et sobres en vue de la prière» (1P 4:7). La prudence est la «droite règle de l'action», écrit saint Thomas (s. th. IIa-IIae, q. 47, a. 2) après Aristote. Elle ne se confond ni avec la timidité ou la peur, ni avec la duplicité ou la dissimulation. Elle est dite auriga virtutum: elle conduit les autres vertus en leur indiquant règle et mesure. C'est la prudence qui guide immédiatement le jugement de conscience. L'homme prudent décide et ordonne sa conduite suivant ce jugement. Grâce à cette vertu, nous appliquons sans erreur les principes moraux aux cas particuliers et nous surmontons les doutes sur le bien à accomplir et le mal à éviter.

§1807
La justice est la vertu morale qui consiste dans la constante et ferme volonté de donner à Dieu et au prochain ce qui leur est dû. La justice envers Dieu est appelée «vertu de religion». Envers les hommes, elle dispose à respecter les droits de chacun et à établir dans les relations humaines l'harmonie qui promeut l'équité à l'égard des personnes et du bien commun. L'homme juste, souvent évoqué dans les Livres saints, se distingue par la droiture habituelle de ses pensées et la rectitude de sa conduite envers le prochain. «Tu n'auras ni faveur pour le petit, ni complaisance pour le grand; c'est avec justice que tu jugeras ton prochain» (Lv 19:15). «Maîtres, accordez à vos esclaves le juste et l'équitable, sachant que, vous aussi, vous avez un Maître au ciel» (Col 4:1).

§1808
La force est la vertu morale qui assure dans les difficultés la fermeté et la constance dans la poursuite du bien. Elle affermit la résolution de résister aux tentations et de surmonter les obstacles dans la vie morale. La vertu de force rend capable de vaincre la peur, même de la mort, d'affronter l'épreuve et les persécutions. Elle dispose à aller jusqu'au renoncement et au sacrifice de sa vie pour défendre une juste cause. «Ma force et mon chant, c'est le Seigneur» (Ps 118:14). «Dans le monde, vous aurez de l'affliction, mais courage, moi j'ai vaincu le monde» (Jn 16:33).

§1809
La tempérance est la vertu morale qui modère l'attrait des plaisirs et procure l'équilibre dans l'usage des biens créés. Elle assure la maîtrise de la volonté sur les instincts et maintient les désirs dans les limites de l'honnêteté. La personne tempérante oriente vers le bien ses appétits sensibles, garde une saine discrétion et «ne se laisse pas entraîner pour suivre les passions de son coeur» (Si 5:2; cf. Si 37:27-31). La tempérance est souvent louée dans l'Ancien Testament: «Ne te laisse pas aller à tes convoitises, réprime tes appétits» (Si 18:30). Dans le Nouveau Testament, elle est appelée «modération» ou «sobriété». Nous devons «vivre avec modération, justice et piété dans le monde présent» (Tt 2:12).

Bien vivre n'est autre chose qu'aimer Dieu de tout son coeur, de toute son âme et de tout son agir. On Lui conserve un amour entier (par la tempérance) que nul malheur ne peut ébranler (ce qui relève de la force), qui n'obéit qu'à Lui seul (et ceci est la justice), qui veille pour discerner toutes choses de peur de se laisser surprendre par la ruse et le mensonge (et ceci est la prudence).
(S. Augustin, mor. eccl. 1, 25, 46: PL 32, 1330-1331)

Les vertus et la grâce

§1810
Les vertus humaines acquises par l'éducation, par des actes délibérés et par une persévérance toujours reprise dans l'effort, sont purifiées et élevées par la grâce divine. Avec l'aide de Dieu, elles forgent le caractère et donnent aisance dans la pratique du bien. L'homme vertueux est heureux de les pratiquer.

§1811
Il n'est pas facile pour l'homme blessé par le péché de garder l'équilibre moral. Le don du salut par le Christ nous accorde la grâce nécessaire pour persévérer dans la recherche des vertus. Chacun doit toujours demander cette grâce de lumière et de force, recourir aux sacrements, coopérer avec le Saint-Esprit, suivre ses appels à aimer le bien et à se garder du mal.

II. Les vertus théologales

§1812
Les vertus humaines s'enracinent dans les vertus théologales qui adaptent les facultés de l'homme à la participation de la nature divine (cf. 2P 1:4). Car les vertus théologales se réfèrent directement à Dieu. Elles disposent les chrétiens à vivre en relation avec la Sainte Trinité. Elles ont Dieu Un et Trine pour origine, pour motif et pour objet.

§1813
Les vertus théologales fondent, animent et caractérisent l'agir moral du chrétien. Elles informent et vivifient toutes les vertus morales. Elles sont infusées par Dieu dans l'âme des fidèles pour les rendre capables d'agir comme ses enfants et de mériter la vie éternelle. Elles sont le gage de la présence et de l'action du Saint Esprit dans les facultés de l'être humain. Il y a trois vertus théologales: la foi, l'espérance et la charité (cf. 1Co 13:13).

La foi

§1814
La foi est la vertu théologale par laquelle nous croyons en Dieu et à tout ce qu'Il nous a dit et révélé, et que la Sainte Église nous propose à croire, parce qu'Il est la vérité même. Par la foi «l'homme s'en remet tout entier librement à Dieu» (DV 5). C'est pourquoi le croyant cherche à connaître et à faire la volonté de Dieu. «Le juste vivra de la foi» (Rm 1:17). La foi vivante «agit par la charité» (Ga 5:6).

§1815
Le don de la foi demeure en celui qui n'a pas péché contre elle (cf. Cc. Trente: DS 1545). Mais «sans les oeuvres, la foi est morte» (Jc 2:26): privée de l'espérance et de l'amour, la foi n'unit pas pleinement le fidèle au Christ et n'en fait pas un membre vivant de son Corps.

§1816
Le disciple du Christ ne doit pas seulement garder la foi et en vivre, mais encore la professer, en témoigner avec assurance et la répandre: «Tous doivent être prêts à confesser le Christ devant les hommes et à le suivre sur le chemin de la Croix, au milieu des persécutions qui ne manquent jamais à l'Église» (LG 42; cf. DH 14). Le service et le témoignage de la foi sont requis pour le Salut: «Quiconque se déclarera pour moi devant les hommes, je me déclarerai, moi aussi, pour lui devant mon Père qui est aux cieux; mais celui qui me reniera devant les hommes, je le renierai, moi aussi, devant mon Père qui est aux cieux» (Mt 10:32-33).

L'espérance

§1817
L'espérance est la vertu théologale par laquelle nous désirons comme notre bonheur le Royaume des cieux et la Vie éternelle, en mettant notre confiance dans les promesses du Christ et en prenant appui, non sur nos forces, mais sur le secours de la grâce du Saint-Esprit. «Gardons indéfectible la confession de l'espérance, car celui qui a promis est fidèle» (He 10:23). «Cet Esprit, il l'a répandu sur nous à profusion, par Jésus Christ notre Sauveur, afin que, justifiés par la grâce du Christ, nous obtenions en espérance l'héritage de la vie éternelle» (Tt 3:6-7).

§1818
La vertu d'espérance répond à l'aspiration au bonheur placée par Dieu dans le coeur de tout homme; elle assume les espoirs qui inspirent les activités des hommes; elle les purifie pour les ordonner au Royaume des cieux; elle protège du découragement; elle soutient en tout délaissement; elle dilate le coeur dans l'attente de la béatitude éternelle. L'élan de l'espérance préserve de l'égoïsme et conduit au bonheur de la charité.

§1819
L'espérance chrétienne reprend et accomplit l'espérance du peuple élu qui trouve son origine et son modèle dans l'espérance d'Abraham comblé en Isaac des promesses de Dieu et purifié par l'épreuve du sacrifice (cf. Gn 17:4-8; Gn 22:1-18). «Espérant contre toute espérance, il crut et devint ainsi père d'une multitude de peuples» (Rm 4:18).

§1820
L'espérance chrétienne se déploie dès le début de la prédication de Jésus dans l'annonce des béatitudes. Les béatitudes élèvent notre espérance vers le Ciel comme vers la nouvelle Terre promise; elles en tracent le chemin à travers les épreuves qui attendent les disciples de Jésus. Mais par les mérites de Jésus Christ et de sa passion, Dieu nous garde dans «l'espérance qui ne déçoit pas» (Rm 5:5). L'espérance est «l'ancre de l'âme», sûre et ferme, «qui pénètre ... là où est entré pour nous, en précurseur, Jésus» (He 6:19-20). Elle est aussi une arme qui nous protège dans le combat du salut: «Revêtons la cuirasse de la foi et de la charité, avec le casque de l'espérance du salut» (1Th 5:8). Elle nous procure la joie dans l'épreuve même: «avec la joie de l'espérance, constants dans la tribulation» (Rm 12:12). Elle s'exprime et se nourrit dans la prière, tout particulièrement dans celle du Pater, résumé de tout ce que l'espérance nous fait désirer.

§1821
Nous pouvons donc espérer la gloire du ciel promise par Dieu à ceux qui l'aiment (cf. Rm 8:28-30) et font sa volonté (cf. Mt 7:21). En toute circonstance, chacun doit espérer, avec la grâce de Dieu, «persévérer jusqu'à la fin» (cf. Mt 10:22; cf. Cc. Trente: DS 1541). et obtenir la joie du ciel, comme l'éternelle récompense de Dieu pour les bonnes oeuvres accomplies avec la grâce du Christ. Dans l'espérance l'Église prie que «tous les hommes soient sauvés» (1Tm 2:4). Elle aspire à être, dans la gloire du ciel, unie au Christ, son Époux:

Espère, ô mon âme, espère. Tu ignores le jour et l'heure. Veille soigneusement, tout passe avec rapidité, quoique ton impatience rende douteux ce qui est certain, et long un temps bien court. Songe que plus tu combattras, plus tu prouveras l'amour que tu portes à ton Dieu, et plus tu te réjouiras un jour avec ton Bien-Aimé, dans un bonheur et un ravissement qui ne pourront jamais finir.
(Ste. Thérèse de Jésus, excl. 15, 3)

La charité

§1822
La charité est la vertu théologale par laquelle nous aimons Dieu par-dessus toute chose pour Lui-même, et notre prochain comme nous-mêmes pour l'amour de Dieu.

§1823
Jésus fait de la charité le commandement nouveau (cf. Jn 13:34). En aimant les siens «jusqu'à la fin» (Jn 13:1), il manifeste l'amour du Père qu'il reçoit. En s'aimant les uns les autres, les disciples imitent l'amour de Jésus qu'ils reçoivent aussi en eux. C'est pourquoi Jésus dit: «Comme le Père m'a aimé, moi aussi je vous ai aimés. Demeurez en mon amour» (Jn 15:9). Et encore: «Voici mon commandement: Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés» (Jn 15:12).

§1824
Fruit de l'Esprit et plénitude de la loi, la charité garde les commandements de Dieu et de son Christ: «Demeurez en mon amour. Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez en mon amour» (Jn 15:9-10; cf. Mt 22:40; Rm 13:8-10).

§1825
Le Christ est mort par amour pour nous alors que nous étions encore «ennemis» Rm 5:10). Le Seigneur nous demande d'aimer comme Lui jusqu'à nos ennemis (Mt 5:44), de nous faire le prochain du plus lointain (cf. Lc 10:27-37), d'aimer les enfants (cf. Mc 9:37) et les pauvres comme Lui-même (Mt 25:40, 45).

L'apôtre saint Paul a donné un incomparable tableau de la charité: «La charité prend patience, la charité rend service, elle ne jalouse pas, elle ne plastronne pas, elle ne s'enfle pas d'orgueil, elle ne fait rien de laid, elle ne cherche pas son intérêt, elle ne s'irrite pas, elle n'entretient pas de rancune, elle ne se réjouit pas de l'injustice, mais elle trouve sa joie dans la vérité. Elle excuse tout, elle croit tout, elle espère tout, elle endure tout» (1Co 13:4-7).

§1826
«Sans la charité, dit encore l'Apôtre, je ne suis rien ...». Et tout ce qui est privilège, service, vertu même ... «sans la charité, cela ne me sert de rien» (1Co 13:1-4). La charité est supérieure à toutes les vertus. Elle est la première des vertus théologales: «Les trois demeurent: la foi, l'espérance et la charité. Mais la charité est la plus grande» (1Co 13:13).

§1827
L'exercice de toutes les vertus est animé et inspiré par la charité. Celle-ci est le «lien de la perfection» (Col 3:14); elle est la forme des vertus; elle les articule et les ordonne entre elles; elle est source et terme de leur pratique chrétienne. La charité assure et purifie notre puissance humaine d'aimer. Elle l'élève à la perfection surnaturelle de l'amour divin.

§1828
La pratique de la vie morale animée par la charité donne au chrétien la liberté spirituelle des enfants de Dieu. Il ne se tient plus devant Dieu comme un esclave, dans la crainte servile, ni comme le mercenaire en quête de salaire, mais comme un fils qui répond à l'amour de «celui qui nous a aimés le premier» (1Jn 4:9):

Ou bien nous nous détournons du mal par crainte du châtiment, et nous sommes dans la disposition de l'esclave. Ou bien nous poursuivons l'appât de la récompense et nous ressemblons aux mercenaires. Ou enfin c'est pour le bien lui-même et l'amour de celui qui commande que nous obéissons ... et nous sommes alors dans la disposition des enfants.
(S. Basile, reg. fus. prol. 3: PG 31, 896B)

§1829
La charité a pour fruits la joie, la paix et la miséricorde; elle exige la bienfaisance et la correction fraternelle; elle est bienveillance; elle suscite la réciprocité, demeure désintéressée et libérale; elle est amitié et communion:

L'achèvement de toutes nos oeuvres, c'est la dilection. Là est la fin; c'est pour l'obtenir que nous courons, c'est vers elle que nous courons; une fois arrivés, c'est en elle que nous nous reposerons.
(S. Augustin, ep. Jo. 10, 4)

III. Les dons et les fruits du Saint-Esprit

§1830
La vie morale des chrétiens est soutenue par les dons du Saint-Esprit. Ceux-ci sont des dispositions permanentes qui rendent l'homme docile à suivre les impulsions de l'Esprit Saint.

§1831
Les sept dons du Saint-Esprit sont la sagesse, l'intelligence, le conseil, la force, la science, la piété et la crainte de Dieu. Ils appartiennent en leur plénitude au Christ, Fils de David (cf. Is 11:1-2). Ils complètent et mènent à leur perfection les vertus de ceux qui les reçoivent. Ils rendent les fidèles dociles à obéir avec promptitude aux inspirations divines.

Que ton Esprit bon me conduise sur une terre unie.
(Ps 143:10)

Tout ceux qu'anime l'Esprit de Dieu sont fils de Dieu... Enfants et donc héritiers; héritiers de Dieu et cohéritiers du Christ.
(Rm 8:4, 17)

§1832
Les fruits de l'Esprit sont des perfections que forme en nous le Saint-Esprit comme des prémices de la gloire éternelle. La tradition de l'Église en énumère douze: «charité, joie, paix, patience, longanimité, bonté, bénignité, mansuétude, fidélité, modestie, continence, chasteté» (Ga 5:22-23 vulg.).

En bref

§1833
La vertu est une disposition habituelle et ferme à faire le bien.

§1834
Les vertus humaines sont des dispositions stables de l'intelligence et de la volonté, qui règlent nos actes, ordonnent nos passions et guident notre conduite selon la raison et la foi. Elles peuvent être regroupées autour de quatre vertus cardinales: la prudence, la justice, la force et la tempérance.

§1835
La prudence dispose la raison pratique à discerner, en toute circonstance, notre véritable bien et à choisir les justes moyens de l'accomplir.

§1836
La justice consiste dans la constante et ferme volonté de donner à Dieu et au prochain ce qui lui est dû.

§1837
La force assure, dans les difficultés, la fermeté et la constance dans la poursuite du bien.

§1838
La tempérance modère l'attrait des plaisirs sensibles et procure l'équilibre dans l'usage des biens créés.

§1839
Les vertus morales grandissent par l'éducation, par des actes délibérés et par la persévérance dans l'effort. La grâce divine les purifie et les élève.

§1840
Les vertus théologales disposent les chrétiens à vivre en relation avec la Sainte Trinité. Elles ont Dieu pour origine, pour motif et pour objet, Dieu connu par la foi, espéré et aimé pour Lui-même.

§1841
Il y a trois vertus théologales: la foi, l'espérance et la charité (cf. 1Co 13:13). Elles informent et vivifient toutes les vertus morales.

§1842
Par la foi nous croyons en Dieu et nous croyons tout ce qu'Il nous a révélé et que la Sainte Église nous propose à croire.

§1843
Par l'espérance nous désirons et attendons de Dieu avec une ferme confiance la vie éternelle et les grâces pour la mériter.

§1844
Par la charité nous aimons Dieu par-dessus toute chose et notre prochain comme nous-même pour l'amour de Dieu. Elle est le «lien de la perfection» (Col 3:14) et la forme de toutes les vertus.

§1845
Les sept dons du Saint Esprit accordés aux chrétiens sont la sagesse, l'intelligence, le conseil, la force, la science, la piété et la crainte de Dieu.

Article 8) Le péché

I. La miséricorde et le péché

§1846
L'Évangile est la révélation, en Jésus Christ, de la miséricorde de Dieu pour les pécheurs (cf. Lc 15). L'ange l'annonce à Joseph: «Tu lui donneras le nom de Jésus: car c'est lui qui sauvera son peuple de ses péchés» (Mt 1:21). Il en va de même de l'Eucharistie, sacrement de la Rédemption: «Ceci est mon sang, le sang de l'Alliance, qui va être répandu pour une multitude en rémission des péchés» (Mt 26:28).

§1847
«Dieu nous a créés sans nous, il n'a pas voulu nous sauver sans nous» (S. Augustin, serm. 169, 11, 13: PL 38, 923). L'accueil de sa miséricorde réclame de nous l'aveu de nos fautes. «Si nous disons: 'Nous n'avons pas de péché', nous nous abusons, la vérité n'est pas en nous. Si nous confessons nos péchés, Il est assez fidèle et juste pour remettre nos péchés et nous purifier de toute injustice» (1Jn 1:8-9).

§1848
Comme l'affirme saint Paul: «Où le péché s'est multiplié, la grâce a surabondé». Mais pour faire son oeuvre, la grâce doit découvrir le péché pour convertir notre coeur et nous conférer «la justice pour la vie éternelle par Jésus Christ Notre Seigneur» (Rm 5:20-21). Tel un médecin qui sonde la plaie avant de la panser, Dieu, par sa Parole et par son Esprit, projette une lumière vive sur le péché:

La conversion requiert la mise en lumière du péché, elle contient en elle-même le jugement intérieur de la conscience. On peut y voir la preuve de l'action de l'Esprit de vérité au plus profond de l'homme, et cela devient en même temps le commencement d'un nouveau don de la grâce et de l'amour: «Recevez l'Esprit Saint». Ainsi, dans cette «mise en lumière du péché» nous découvrons un double don: le don de la vérité de la conscience et le don de la certitude de la rédemption. L'Esprit de vérité est le Consolateur .
(DeV 31)

II. La définition du péché

§1849
Le péché est une faute contre la raison, la vérité, la conscience droite; il est un manquement à l'amour véritable, envers Dieu et envers le prochain, à cause d'un attachement pervers à certains biens. Il blesse la nature de l'homme et porte atteinte à la solidarité humaine. Il a été défini comme «une parole, un acte ou un désir contraires à la loi éternelle» (S. Augustin, Faust. 22, 27: PL 42, 418; S. Thomas d'A., s. th. 1-2, 71, 6).

§1850
Le péché est une offense de Dieu: «Contre toi, toi seul, j'ai péché. Ce qui est mal à tes yeux, je l'ai fait» (Ps 51:6). Le péché se dresse contre l'amour de Dieu pour nous et en détourne nos coeurs. Comme le péché premier, il est une désobéissance, une révolte contre Dieu, par la volonté de devenir «comme des dieux», connaissant et déterminant le bien et le mal (Gn 3:5). Le péché est ainsi «amour de soi jusqu'au mépris de Dieu» (S. Augustin, civ. 14, 28). Par cette exaltation orgueilleuse de soi, le péché est diamétralement contraire à l'obéissance de Jésus qui accomplit le salut (cf. Ph 2:6-9).

§1851
C'est précisément dans la Passion où la miséricorde du Christ va le vaincre, que le péché manifeste le mieux sa violence et sa multiplicité: incrédulité, haine meurtrière, rejet et moqueries de la part des chefs et du peuple, lâcheté de Pilate et cruauté des soldats, trahison de Judas si dure à Jésus, reniement de Pierre et abandon des disciples. Cependant, à l'heure même des ténèbres et du Prince de ce monde (cf. Jn 14:30), le sacrifice du Christ devient secrètement la source de laquelle jaillira intarissablement le pardon de nos péchés.

III. La diversité des péchés

§1852
La variété des péchés est grande. L'Écriture en fournit plusieurs listes. L'épître aux Galates oppose les oeuvres de la chair au fruit de l'Esprit: «On sait bien tout ce que produit la chair: fornication, impureté, débauche, idolâtrie, magie, haines, discorde, jalousie, emportements, disputes, dissensions, scissions, sentiments d'envie, orgies, ripailles et choses semblables -- et je vous préviens, comme je l'ai déjà fait, que ceux qui commettent ces fautes là n'hériteront pas du Royaume de Dieu» (Ga 5:19-21; cf. Rm 1:28-32; 1Co 6:9-10; Ep 5:3-5; Col 3:5-8; 1Tm 1:9-10; 2Tm 3:2-5).

§1853
On peut distinguer les péchés selon leur objet, comme pour tout acte humain, ou selon les vertus auxquelles ils s'opposent, par excès ou par défaut, ou selon les commandements qu'ils contrarient. On peut les ranger aussi selon qu'ils concernent Dieu, le prochain ou soi-même; on peut les diviser en péchés spirituels et charnels, ou encore en péchés en pensée, en parole, par action ou par omission. La racine du péché est dans le coeur de l'homme, dans sa libre volonté, selon l'enseignement du Seigneur: «Du coeur en effet procèdent mauvais desseins, meurtres, adultères, débauches, vols, faux témoignages, diffamations. Voilà les choses qui rendent l'homme impur» (Mt 15:19). Dans le coeur réside aussi la charité, principe des oeuvres bonnes et pures, que blesse le péché.

IV. La gravité du péché: péché mortel et véniel

§1854
Il convient d'apprécier les péchés selon leur gravité. Déjà perceptible dans l'Écriture (cf. 1Jn 5:16-17), la distinction entre péché mortel et péché véniel s'est imposée dans la tradition de l'Église. L'expérience des hommes la corrobore.

§1855
Le péché mortel détruit la charité dans le coeur de l'homme par une infraction grave à la loi de Dieu; il détourne l'homme de Dieu, qui est sa fin ultime et sa béatitude en Lui préférant un bien inférieur.

Le péché véniel laisse subsister la charité, même s'il l'offense et la blesse.

§1856
Le péché mortel, attaquant en nous le principe vital qu'est la charité, nécessite une nouvelle initiative de la miséricorde de Dieu et une conversion du coeur qui s'accomplit normalement dans le cadre du sacrement de la Réconciliation:

Lorsque la volonté se porte à une chose de soi contraire à la charité par laquelle on est ordonné à la fin ultime, le péché par son objet même a de quoi être mortel... qu'il soit contre l'amour de Dieu, comme le blasphème, le parjure, etc. ou contre l'amour du prochain, comme l'homicide, l'adultère, etc ... En revanche, lorsque la volonté du pécheur se porte quelquefois à une chose qui contient en soi un désordre mais n'est cependant pas contraire à l'amour de Dieu et du prochain, tel que parole oiseuse, rire superflu, etc., de tels péchés sont véniels
(S. Thomas d'A., s. th. 1-2, 88, 2).

§1857
Pour qu'un péché soit mortel trois conditions sont ensemble requises: «Est péché mortel tout péché qui a pour objet une matière grave, et qui est commis en pleine conscience et de propos délibéré» (RP 17).

§1858
La matière grave est précisée par les Dix commandements selon la réponse de Jésus au jeune homme riche: «Ne tue pas, ne commets pas d'adultère, ne vole pas, ne porte pas de faux témoignage, ne fais pas de tort, honore ton père et ta mère» (Mc 10:18). La gravité des péchés est plus ou moins grande: un meurtre est plus grave qu'un vol. La qualité des personnes lésées entre aussi en ligne de compte: la violence exercée contre les parents est de soi plus grave qu'envers un étranger.

§1859
Le péché mortel requiert pleine connaissance et entier consentement. Il présuppose la connaissance du caractère peccamineux de l'acte, de son opposition à la Loi de Dieu. Il implique aussi un consentement suffisamment délibéré pour être un choix personnel. L'ignorance affectée et l'endurcissement du coeur (cf. Mc 3:5-6; Lc 16:19-31) ne diminuent pas, mais augmentent le caractère volontaire du péché.

§1860
L'ignorance involontaire peut diminuer sinon excuser l'imputabilité d'une faute grave. Mais nul n'est censé ignorer les principes de la loi morale qui sont inscrits dans la conscience de tout homme. Les impulsions de la sensibilité, les passions peuvent également réduire le caractère volontaire et libre de la faute, de même que des pressions extérieures ou des troubles pathologiques. Le péché par malice, par choix délibéré du mal, est le plus grave.

§1861
Le péché mortel est une possibilité radicale de la liberté humaine comme l'amour lui-même. Il entraîne la perte de la charité et la privation de la grâce sanctifiante, c'est-à-dire de l'état de grâce. S'il n'est pas racheté par le repentir et le pardon de Dieu, il cause l'exclusion du Royaume du Christ et la mort éternelle de l'enfer, notre liberté ayant le pouvoir de faire des choix pour toujours, sans retour. Cependant si nous pouvons juger qu'un acte est en soi une faute grave, nous devons confier le jugement sur les personnes à la justice et à la miséricorde de Dieu.

§1862
On commet un péché véniel quand on n'observe pas dans une matière légère la mesure prescrite par la loi morale, ou bien quand on désobéit à la loi morale en matière grave, mais sans pleine connaissance ou sans entier consentement.

§1863
Le péché véniel affaiblit la charité; il traduit une affection désordonnée pour des biens créés; il empêche les progrès de l'âme dans l'exercice des vertus et la pratique du bien moral; il mérite des peines temporelles. Le péché véniel délibéré et resté sans repentance nous dispose peu à peu à commettre le péché mortel. Cependant le péché véniel ne rompt pas l'Alliance avec Dieu. Il est humainement réparable avec la grâce de Dieu. «Il ne prive pas de la grâce sanctifiante ou déifiante et de la charité, ni par suite, de la béatitude éternelle» (RP 17):

L'homme ne peut, tant qu'il est dans la chair, éviter tout péché, du moins les péchés légers. Mais ces péchés que nous disons légers, ne les tiens pas pour anodins: si tu les tiens pour anodins quand tu les pèses, tremble quand tu les comptes. Nombre d'objets légers font une grande masse; nombre de gouttes emplissent un fleuve; nombre de grains font un monceau. Quelle est alors notre espérance? Avant tout, la confession ...
(S. Augustin, ep. Jo. 1, 6).

§1864
«Tout péché et blasphème sera remis aux hommes, mais le blasphème contre l'Esprit ne sera pas remis» (Mt 12:31; cf. Mc 3:29; Lc 12:10). Il n'y a pas de limites à la miséricorde de Dieu, mais qui refuse délibérément d'accueillir la miséricorde de Dieu par le repentir rejette le pardon de ses péchés et le salut offert par l'Esprit Saint (cf. DeV 46). Un tel endurcissement peut conduire à l'impénitence finale et à la perte éternelle.

V. La prolifération du péché

§1865
Le péché crée un entraînement au péché; il engendre le vice par la répétition des mêmes actes. Il en résulte des inclinations perverses qui obscurcissent la conscience et corrompent l'appréciation concrète du bien et du mal. Ainsi le péché tend-il à se reproduire et à se renforcer, mais il ne peut détruire le sens moral jusqu'en sa racine.

§1866
Les vices peuvent être rangés d'après les vertus qu'ils contrarient, ou encore rattachés aux péchés capitaux que l'expérience chrétienne a distingués à la suite de S. Jean Cassien et de S. Grégoire le Grand (mor. 31, 45: PL 76, 621A). Ils sont appelés capitaux parce qu'ils sont générateurs d'autres péchés, d'autres vices. Ce sont l'orgueil, l'avarice, l'envie, la colère, l'impureté, la gourmandise, la paresse ou acédie.

§1867
La tradition catéchétique rappelle aussi qu'il existe des «péchés qui crient vers le ciel». Crient vers le ciel: le sang d'Abel (cf. Gn 4:10); le péché des Sodomites (cf. Gn 18:20; 19:13) la clameur du peuple opprimé en Egypte (cf. Ex 3:7-10); la plainte de l'étranger, de la veuve et de l'orphelin (cf. Ex 22:20-22); l'injustice envers le salarié (cf. Dt 24:14-15; Jc 5:4).

§1868
Le péché est un acte personnel. De plus, nous avons une responsabilité dans les péchés commis par d'autres, quand nous y coopérons:

-- en y participant directement et volontairement;

-- en les commandant, les conseillant, les louant ou les approuvant;

-- en ne les révélant pas ou en ne les empêchant pas, quand on y est tenu;

-- en protégeant ceux qui font le mal.

§1869
Ainsi le péché rend les hommes complices les uns des autres, fait régner entre eux la concupiscence, la violence et l'injustice. Les péchés provoquent des situations sociales et des institutions contraires à la Bonté divine. Les «structures de péché» sont l'expression et l'effet des péchés personnels. Elles induisent leurs victimes à commettre le mal à leur tour. Dans un sens analogique elles constituent un «péché social» (RP 16).

En bref

§1870
«Dieu a enfermé tous les hommes dans la désobéissance pour faire à tous miséricorde» (Rm 11:32).

§1871
Le péché est «une parole, un acte ou un désir contraires à la loi éternelle. Il est une offense à Dieu. Il se dresse contre Dieu dans une désobéissance contraire à l'obéissance du Christ.

§1872
Le péché et un acte contraire à la raison. Il blesse la nature de l'homme et porte atteinte à la solidarité humaine.

§1873
La racine de tous les péchés est dans le coeur de l'homme. Leurs espèces et leur gravité se mesurent principalement selon leur objet.

§1874
Choisir délibérément, c'est-à-dire en le sachant et en le voulant, une chose gravement contraire à la loi divine et à la fin dernière de l'homme, c'est commettre un péché mortel. Celui-ci détruit en nous la charité sans laquelle la béatitude éternelle est impossible. Sans repentir, il entraîne la mort éternelle.

§1875
Le péché véniel constitue un désordre moral réparable par la charité qu'il laisse subsister en nous.

§1876
La répétition des péchés, même véniels, engendre les vices parmi lesquels on distingue les péchés capitaux.

Chapitre 2) La communauté humaine

§1877
La vocation de l'humanité est de manifester l'image de Dieu et d'être transformée à l'image du Fils Unique du Père. Cette vocation revêt une forme personnelle, puisque chacun est appelé à entrer dans la béatitude divine; elle concerne aussi l'ensemble de la communauté humaine.

Article 1) La personne et la société

I. Le caractère communautaire de la vocation humaine

§1878
Tous les hommes sont appelés à la même fin, Dieu lui-même. Il existe une certaine ressemblance entre l'unité des personnes divines et la fraternité que les hommes doivent instaurer entre eux, dans la vérité et l'amour (cf. GS 24, §3). L'amour du prochain est inséparable de l'amour pour Dieu.

§1879
La personne humaine a besoin de la vie sociale. Celle-ci ne constitue pas pour elle quelque chose de surajouté, mais une exigence de sa nature. Par l'échange avec autrui, la réciprocité des services et le dialogue avec ses frères, l'homme développe ses virtualités; il répond ainsi à sa vocation (cf. GS 25, §1).

§1880
Une société est un ensemble de personnes liées de façon organique par un principe d'unité qui dépasse chacune d'elles. Assemblée à la fois visible et spirituelle, une société perdure dans le temps: elle recueille le passé et prépare l'avenir. Par elle, chaque homme est constitué «héritier», reçoit des «talents» qui enrichissent son identité et dont il doit développer les fruits (cf. Lc 19:16, 19). À juste titre, chacun doit le dévouement aux communautés dont il fait partie et le respect aux autorités en charge du bien commun.

§1881
Chaque communauté se définit par son but et obéit en conséquence à des règles spécifiques, mais «la personne humaine est et doit être le principe, le sujet et la fin de toutes les institutions sociales» (GS 25, §1).

§1882
Certaines sociétés, telles que la famille et la cité, correspondent plus immédiatement à la nature de l'homme. Elles lui sont nécessaires. Afin de favoriser la participation du plus grand nombre à la vie sociale, il faut encourager la création d'associations et d'institutions librement choisies «à buts économiques, culturels, sociaux, sportifs, récréatifs, professionnels, politiques, aussi bien à l'intérieur des communautés politiques que sur le plan mondial» (MM 60). Cette «socialisation» exprime également la tendance naturelle qui pousse les hommes à s'associer, en vue d'atteindre des objectifs qui excèdent les capacités individuelles. Elle développe les qualités de la personne, en particulier, son sens de l'initiative et de la responsabilité. Elle aide à garantir ses droits (GS 25, §2; CA 12).

§1883
La socialisation présente aussi des dangers. Une intervention trop poussée de l'État peut menacer la liberté et l'initiative personnelles. La doctrine de l'Église a élaboré le principe dit de subsidiarité. Selon celui-ci, «une société d'ordre supérieur ne doit pas intervenir dans la vie interne d'une société d'ordre inférieur en lui enlevant ses compétences, mais elle doit plutôt la soutenir en cas de nécessité et l'aider à coordonner son action avec celle des autres éléments qui composent la société, en vue du bien commun» (CA 48; cf. Pie XI, enc. «Quadragesimo anno»).

§1884
Dieu n'a pas voulu retenir pour lui seul l'exercice de tous les pouvoirs. Il remet à chaque créature les fonctions qu'elle est capable d'exercer, selon les capacités de sa nature propre. Ce mode de gouvernement doit être imité dans la vie sociale. Le comportement de Dieu dans le gouvernement du monde, qui témoigne de si grands égards pour la liberté humaine, devrait inspirer la sagesse de ceux qui gouvernent les communautés humaines. Ils ont à se comporter en ministres de la providence divine.

§1885
Le principe de subsidiarité s'oppose à toutes les formes de collectivisme. Il trace les limites de l'intervention de l'État. Il vise à harmoniser les rapports entre les individus et les sociétés. Il tend à instaurer un véritable ordre international.

II. La conversion et la société

§1886
La société est indispensable à la réalisation de la vocation humaine. Pour atteindre ce but il faut que soit respectée la juste hiérarchie des valeurs qui «subordonne les dimensions physiques et instinctives aux dimensions intérieures et spirituelles» (CA 36):

La vie en société doit être considérée avant tout comme une réalité d'ordre spirituel. Elle est, en effet, échange de connaissances dans la lumière de la vérité, exercice de droits et accomplissement des devoirs, émulation dans la recherche du bien moral, communion dans la noble jouissance du beau en toutes ses expressions légitimes, disposition permanente à communiquer à autrui le meilleur de soi-même et aspiration commune à un constant enrichissement spirituel. Telles sont les valeurs qui doivent animer et orienter l'activité culturelle, la vie économique, l'organisation sociale, les mouvements et les régimes politiques, la législation et toutes les autres expressions de la vie sociale dans sa continuelle évolution.
(PT 35)

§1887
L'inversion des moyens et des fins (cf. CA 41), qui aboutit à donner valeur de fin ultime à ce qui n'est que moyen d'y concourir, ou à considérer des personnes comme de purs moyens en vue d'un but, engendre des structures injustes qui «rendent ardue et pratiquement impossible une conduite chrétienne, conforme aux commandements du Divin Législateur» (Pie XII, discours 1er juin 1941).

§1888
Il faut alors faire appel aux capacités spirituelles et morales de la personne et à l'exigence permanente de sa conversion intérieure, afin d'obtenir des changements sociaux qui soient réellement à son service. La priorité reconnue à la conversion du coeur n'élimine nullement, elle impose, au contraire, l'obligation d'apporter aux institutions et aux conditions de vie, quand elles provoquent le péché, les assainissements convenables pour qu'elles se conforment aux normes de la justice, et favorisent le bien au lieu d'y faire obstacle (cf. LG 36).

§1889
Sans le secours de la grâce, les hommes ne sauraient «découvrir le sentier, souvent étroit, entre la lâcheté qui cède au mal et la violence qui, croyant le combattre, l'aggrave» (CA 25). C'est le chemin de la charité, c'est-à-dire de l'amour de Dieu et du prochain. La charité représente le plus grand commandement social. Elle respecte autrui et ses droits. Elle exige la pratique de la justice et seule nous en rend capables. Elle inspire une vie de don de soi: «Qui cherchera à conserver sa vie la perdra, et qui la perdra la sauvera» (Lc 17:33).

En bref

§1890
Il existe une certaine ressemblance entre l'unité des personnes divines et la fraternité que les hommes doivent instaurer entre eux.

§1891
Pour se développer en conformité avec sa nature, la personne humaine a besoin de la vie sociale. Certaines sociétés, comme la famille et la cité, correspondent plus immédiatement à la nature de l'homme.

§1892
«La personne humaine est, et doit être le principe, le sujet et la fin de toutes les institutions sociales». (GS 25, §1)

§1893
Il faut encourager une large participation à des associations et des institutions librement choisies.

§1894
Selon le principe de subsidiarité, ni l'État ni aucune société plus vaste ne doivent se substituer à l'initiative et à la responsabilité des personnes et des corps intermédiaires.

§1895
La société doit favoriser l'exercice des vertus, non y faire obstacle. Une juste hiérarchie des valeurs doit l'inspirer.

§1896
Là où le péché pervertit le climat social, il faut faire appel à la conversion des coeurs et à la grâce de Dieu. La charité pousse à de justes réformes. Il n'y a pas de solution à la question sociale en dehors de l'Évangile. (cf. CA 3).

Article 2) La participation à la vie sociale

I. L'autorité

§1897
«À la vie en société manqueraient l'ordre et la fécondité sans la présence d'hommes légitimement investis de l'autorité et qui assurent la sauvegarde des institutions et pourvoient, dans une mesure suffisante, au bien commun» (PT 46).

On appelle «autorité» la qualité en vertu de laquelle des personnes ou des institutions donnent des lois et des ordres à des hommes, et attendent une obéissance de leur part.

§1898
Toute communauté humaine a besoin d'une autorité qui la régisse (cf. Léon XIII, enc. «Immortale Dei»; enc. «Diuturnum illud»). Celle-ci trouve son fondement dans la nature humaine. Elle est nécessaire à l'unité de la Cité. Son rôle consiste à assurer autant que possible le bien commun de la société.

§1899
L'autorité exigée par l'ordre moral émane de Dieu: «Que tout homme soit soumis aux autorités qui exercent le pouvoir, car il n'y a d'autorité que par Dieu et celles qui existent sont établies par lui. Ainsi, celui qui s'oppose à l'autorité se rebelle contre l'ordre voulu par Dieu, et les rebelles attireront la condamnation sur eux-mêmes» (Rm 13:1-2; cf. 1P 2:13-17).

Catéchisme de l'Église catholique © Libreria Editrice Vaticana 1992.

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