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Correspondance avec M. Guillaume Loignon

M. Guillaume Loignon
M. Guillaume Loignon
«Tu remarqueras peut-être la toile du Douanier que j'ai glissé à l'arrière,
question d'ajouter ma touche personnelle à l'esthétique de ton site».

1) Table des matières

2) Explication du concours
3) Nos trois distingués arbitres
4) Résumé du débat
5) Le débat en tant que tel

5.1) G. Loignon (2008-janvier-09)
5.2) S. Jetchick (2008-janvier-10)
5.3) G. Loignon (2008-janvier-17)
5.4) S. Jetchick (2008-janvier-21)
5.5) G. Loignon (2008-janvier-29)
5.6) S. Jetchick (2008-février-05)
5.7) Rapport d'arbitrage No. 1 (2008-février-12)
5.8) S. Jetchick sur le Rapport No. 1 (2008-février-12)
5.9) G. Loignon (2008-février-12)
5.10) Rapport d'arbitrage No. 2 (2008-février-12)
5.11) Petit cours d'arbitrage aux arbitres (2008-février-14)

Annexe: Courriels avant le débat
Annexe: Courriels après la suspension du débat par S. Jetchick

2) Explication du concours

Voir: Joute intellectuelle!

3) Nos trois distingués arbitres

M. Gildas Haméon
M. Gildas Haméon est professeur au cégep de Saint-Félicien.

M. Denis Labelle
M. Denis Labelle est mathématicien, gestionnaire du forum des sceptiques du Québec
et inventeur d'une méthode de débat du nom de REDICO

M. Jean Ouellette
M. Jean Ouellette, Cofondateur des Sceptiques du Québec et de
La libre pensée québécoise.

4) Résumé du débat

Note: Ce résumé a été fait seulement par S. Jetchick.

4.1) Énoncés sur lesquels nous semblons nous entendre (Concedo)

[3] Plusieurs religions sont cinglées.

[4] Si le bien et le mal ne sont que des étiquettes collées sur des actes, par pure convention humaine, pas besoin de Dieu pour avoir du «bien» et du «mal».

[5] Ce que certaines personnes considèrent comme étant «bien» ou «mal» dépend de multiples facteurs bizarres (coutumes ancestrales, taux d'alcoolémie, superstitions...)

[6] La morale naturelle existe, on peut la découvrir avec la raison, sans la Foi catholique.

[7] Une «morale» créée de manière arbitraire, même par Dieu, n'est pas une morale.

[8] Lorsqu'une intelligence produit de l'ordre, on peut découvrir les intentions de cette intelligence en examinant cet ordre.

[9] L'ignorance ne prouve rien. Par exemple, si on ignore les lois d'optique qui expliquent les arcs-en-ciel, cela ne veut pas dire qu'il faut postuler que Dieu existe afin de les expliquer!

[16] La sélection naturelle ne fonctionne pas par hasard.

[17] Le mot «être» a plusieurs sens qu'il faut définir clairement.

[18] L'information ne provient pas toujours des sens externes. La réflexion (ou «introspection») aussi permet de constater de nouveaux faits.

[19] l'évolution fonctionne à partir de groupes de population, pas d'individus.

[20] «L'homme est un microcosme», c'est-à-dire que l'homme est comme un résumé de toutes les merveilles de l'univers visible, qu'on peut étudier en «couches» successives, comme la physique, la chimie, la biologie, la psychologie, la sociologie, etc.

Guillaume (côté athée)

Stefan (côté chrétien)

[1] Même si Dieu n'existe pas, le bien et le mal peuvent exister.

[11] il y a abondamment de faits démontrant [...] l'évolution de la conscience. (sous-entendu: «La pure matière peut devenir consciente».)

[2] Si Dieu n'existe pas, le bien et le mal ne peuvent pas exister.

[12] La matière ne peut pas devenir consciente.

5) Le débat en tant que tel

Tous les courriels de ce débat sont affichés sur les deux sites web suivants, et doivent respecter les conditions énumérées dans le courriel du 2007-octobre-19:

dechamplain.org/category/debat/
www.inquisition.ca

5.1) G. Loignon (2008-janvier-09)

Original de ce message sur le site de Guillaume.

-----Original Message-----
From: Guillaume Loignon
Sent: 9 janvier 2008 21:36
To: Stefan Jetchick
Subject: Premier message de l'échange

Bonjour à tous,

Salutations à Stefan, à messieurs les arbitres et tous ceux qui liront
ce débat. Je voudrais exposer ici l'argumentaire que je compte
employer dans l'échange qui suivra, tout en exposant brièvement mon
point de vue.

Rappelons que la question du débat est «Si Dieu n'existe pas, le bien
et le mal peuvent-il exister?» [1] La position que je défendrai est que
l'existence d'un être transcendant créateur du monde n'a aucune
incidence sur l'existence du bien et du mal, bien que [5] la croyance en
un tel être puisse influencer le jugement des agents moraux dans un
sens ou dans l'autre. Autrement dit, ce qui est bien ou mal l'est
indépendamment de l'existence de Dieu et, même chez les croyants, la
catégorisation d'actes humains en termes de «bien» et de «mal» est
indépendante du fait qu'un dieu existe - ou non.

Je démontrerai également que l'association fréquente de la moralité à
la religion est purement contingente. Nous verrons quelles sont les
raisons réelles expliquant pourquoi religion et moralité sont souvent
aperçues ensemble, et à quel point le climat socio-culturel (par
opposition à un Législateur divin) influence l'élaboration et la
modification subséquente d'une morale religieuse.

[4] Loin de moi toutefois l'idée d'avancer une morale arbitraire,
subjective ou relativiste. J'estime qu'il y a des actes moraux
corrects et d'autres incorrects, le plus souvent désignés par les
étiquettes «bien» et «mal». Ainsi, j'argumenterai qu'à partir de
nos intuitions morales, nous pouvons nous donner (en société) des
règles de conduite maximisant le bien-être et minimisant la souffrance
et la discorde. Par l'étude empirique et philosophique de l'être
humain, de ses besoins et de sa constitution, il est possible
d'améliorer cet ensemble de règles et de rendre notre éthique plus
universelle.

J'afficherai donc ouvertement une confiance dans la raison humaine,
moteur capable d'améliorer nos codes moraux. Sans considérer l'origine
des lois, des codes et des règles, il reste qu'en derniers lieux les
jugements moraux sont exercés par des êtres doués de raison. C'est
donc notre autonomie de raisonnement, [6] et non notre adhésion à des
dogmes, qui nous rend des êtres capables de morale: la morale concerne
les humains, et non des anges et des fantômes.

J'irai un pas plus loin: la moralité concerne des situations concrètes
de la vie humaine, par opposition aux notions transcendantes
qu'impliquent les religions. Par exemple, qu'est-ce que voler le bien
du voisin? C'est s'emparer d'un objet qui est reconnu comme
appartenant au voisin, et ce sans l'accord de celui-ci. Dieu, les
anges, les esprits n'interviennent nulle part dans ce raisonnement. En
fait, même les liens supposés entre la moralité et le divin concernent
en réalité des choses bien terre-à-terre. [3] Ainsi, telle congrégation
est persuadée que le mauvais temps a été causé par le blasphème commis
par Machin, telle autre religion croit que le sida est causé par le
«péché d'homosexualité», et ainsi de suite. L'appel au religieux vise
alors à expliquer ce qui est mystérieux, rare ou étonnant.

C'est donc par ignorance que l'on a au départ associé moralité et
religion, et ce lien a perduré comme vestige, bien que l'on possède
aujourd'hui un grand nombre des explications que l'on cherchait
autrefois. En approfondissant les points abordés plus haut, nous
aurons l'occasion de voir que je ne prêche pas le retrait de Dieu des
affaires morales, mais que je constate que Dieu n'y a jamais
réellement pris part.

Cordialement,
Guillaume

5.2) S. Jetchick (2008-janvier-10)

Lapin et chapeau
(Source)

-----Original Message-----
From: Stefan Jetchick
Sent: 10 janvier 2008 20:19
To: Guillaume Loignon
Subject: RE: Premier message de l'échange

Messires les Arbitres,
Distingués cyber-spectateurs,
Noble adversaire,

Bonsoir!

J'ai un peu l'impression d'être assis sur mon cheval, avec
mon armure et ma lance, et de voir Sire Guillaume crier
«À l'attaque!» pour ensuite foncer dans les spectateurs!

Youhou, Guillaume, je suis ici! C'est moi qu'il faut attaquer!

;-)

(J'aime taquiner mes adversaires!)

Sérieusement, il y a des choses sur lesquelles nous sommes
déjà d'accord, et qui en plus n'ont pas rapport au débat:

	[3] - Plusieurs religions sont cinglées.

	[6] - La morale naturelle existe, on peut la découvrir
	avec la raison, sans la Foi.

	[4] - Si le bien et le mal ne sont que des étiquettes
	collées sur des actes, par pure convention humaine,
	pas besoin de Dieu pour avoir du «bien» et du «mal».

	[5] - Ce que certaines personnes considèrent comme étant
	«bien» ou «mal» dépend de multiples facteurs bizarres
	(coutumes ancestrales, taux d'alcoolémie, superstitions...)

	- Etc.

Mais le sujet du débat est: «Si Dieu n'existe pas, le bien
et le mal peuvent-ils exister?»

Il faut donc faire comme un magicien: d'abord montrer que le
chapeau est bien vide (éliminer Dieu), pour ensuite en tirer
un beau lapin (montrer que le bien et le mal continuent
d'exister).

Plongeons donc dans un chapeau vide!

Pas de Dieu. Il n'y a que des atomes qui se foncent dedans,
au hasard. Quelles combinaisons prennent-elles? Celles
qu'elles prennent, au fil des années. C'est un peu comme
l'odomètre d'une voiture qui change de numéro, kilomètre
après kilomètre (mais sans toujours augmenter).

À un moment donné, un tas d'atomes forme la première cellule
vivante. La vie est-elle «sacrée» pour autant? Non, pas de
Dieu, pas de «sacré». Le numéro sur l'odomètre a changé, tout
simplement.

Plus tard, des pattes poussent sur un poisson, et il sort
de l'eau. Les autres poissons devraient-ils hurler:
«Tricheur! Pas le droit d'avoir des pattes!» Non. Le numéro
sur l'odomètre a changé, au gré des lois de la physique.
Ces lois sont-elle Dieu? Non. Elles sont. Vont-elles
changer? Pourquoi pas?

Un jour, une sorte de singe se met à «réfléchir». Que dis-je!
Les atomes dans son cerveau se foncent dedans de manière
à produire des courants électriques différents, dans ses
neurones. Les singes normaux devraient-ils lui hurler:
«Pas le droit de devenir libre et raisonnable!» Non. Le numéro
sur l'odomètre a changé.

[24] D'ailleurs, comment un tas d'atomes pourrait-il être «libre»?
Le cerveau humain est tout simplement un tas d'atomes trop
compliqué pour que nous puissions prévoir le comportement
d'un individu (pour l'instant).

[22] L'homme est-il le «Sommet de l'Évolution»? Le concept de
«sommet» n'a aucun sens. «L'Évolution» avec un grand «E»
n'est pas un Dieu qui guide nos destinées. En fait, en se
basant sur la biologie, il est plutôt probable que l'homme
n'est qu'un numéro de l'odomètre, et que d'autres organismes
surgiront (ou commencent déjà à surgir parmi nous). La distance
entre notre «numéro» et leur «numéro» pourrait bien être plus
grande que celle du poisson à pattes comparé au poisson sans
pattes, ou de l'homme comparé au singe.

[23] Faut-il lutter pour préserver l'humanité? La question n'a
pas de sens. Nous allons agir, selon les chocs des atomes
dans nos cerveaux. Cela va-t-il nous faire disparaître
de la face de la Terre? Peut-être. Pourquoi pas? Les
dinosaures ont bien disparu.

Le «bien» et le «mal» existent-ils? Si la personne qui
fait les raisonnements décrits ci-haut répond «Non» en
public, ça pourrait nuire à sa carrière. Moins d'argent,
moins de plaisir. Donc elle dit «Oui». Qui va savoir qu'elle
ment? Dieu?

;-)

[Note de SJJ: voir mon courriel à M. Gildas Haméon du
2008-fév-18 au sujet de ce dernier paragraphe.]


=======================================================
Réponse point-par-point (facultative, pour les lecteurs zélés!)

En passant, Guillaume, on s'était mis d'accord sur 50
lignes, mais une «ligne» c'est un peu vague, alors j'essaie
d'avoir environ le même nombre de mots que toi. (Ton premier
courriel a environ 585 mots, la première partie du mien
environ 575.)


>> La position que je défendrai est que
>> l'existence d'un être transcendant créateur du monde n'a aucune
>> incidence sur l'existence du bien et du mal [...] Autrement dit,
>> ce qui est bien ou mal l'est indépendamment de l'existence de Dieu

Ah! D'entrée de jeu, une prise de position claire et virile!
Merci!

(Guillaume, tu devrais donner des cours de clarté et de
virilité aux évêques catholiques du Québec!)


>> Je démontrerai également que l'association fréquente de la moralité à
>> la religion est purement contingente.

C'est sûr que tu peux prouver plus de choses que ce qu'on
te demande.

Mais si j'étais toi, je n'ambitionnerais pas trop. Déjà,
juste pour définir correctement le mot «religion» dans ta
phrase ci-dessus, tu aurais tout un mal de tête.


>> J'estime qu'il y a des actes moraux
>> corrects et d'autres incorrects, le plus souvent désignés par les
>> étiquettes «bien» et «mal».

Mais n'oublie pas que le but de notre débat n'est précisément
pas de prouver qu'on peut mettre des étiquettes «bien» et «mal»
sur n'importe quoi. (Sinon je vais mettre une étiquette
«Prix de 1000$» sur n'importe quoi!)


>> nous pouvons nous donner (en société) des
>> règles de conduite maximisant le bien-être et minimisant la souffrance
>> et la discorde.

Concedo, mais à certaines conditions.

Exemples de ces conditions:

	- Définir «bien-être» comme étant «secondairement le plaisir
	physique». (Si le plaisir physique est la seule règle de
	«bien» et de «mal», moi ça va me donner beaucoup de plaisir
	de garder mon 1000$!)

	- Définir «nous donner en société» comme «constater tous ensemble
	l'existence d'une Loi naturelle qui existe indépendamment de nos
	conventions sociales».

	- Etc.


>> Par l'étude empirique et philosophique de l'être
>> humain, de ses besoins et de sa constitution

Dit d'une autre façon, «Il serait mauvais de baigner un bébé dans
l'acide sulfurique, à cause de la nature même du bébé.» En
d'autres mots, comme le bien est ce qui convient, ce qui perfectionne
un être, en étudiant rationnellement et philosophiquement l'être
humain, on peut découvrir la morale naturelle.

Tout le monde est d'accord avec ça, même le Pape!

(Sauf que s'il n'y a que des atomes qui se foncent dedans au
hasard, le concept de «ce qui convient», de «perfection»,
s'évanouit.)


>> J'afficherai donc ouvertement une confiance dans la raison humaine

Tout le monde est d'accord avec ça, même le Pape!


>> [ce n'est pas] notre adhésion à des
>> dogmes, qui nous rend des êtres capables de morale

Tout le monde est d'accord avec ça, même le Pape!


>> la morale [ne concerne pas les] fantômes.

Tout le monde est d'accord avec ça, même le Pape!


>> la morale [ne concerne pas] les anges.

Personne n'est d'accord avec ça, surtout pas le Pape!

Toi, tu as une raison et une volonté. Tu peux voir qu'un acte
est bon avec ta raison, et librement décider d'agir bien
ou mal.

Si on postule l'hypothèse d'un être doué de raison et de
volonté, mais pas doué d'un corps matériel, cet être
aurait, comme toi, tout ce qu'il faut pour agir moralement.

(Et oui, même le Pape est d'accord avec toi qu'en philosophie,
on ne peut pas prouver l'existence des anges.)


>> qu'est-ce que voler le bien du voisin? [...] Dieu, les
>> anges, les esprits n'interviennent [directement, prochainement]
>> nulle part dans ce raisonnement.

Tout le monde est d'accord avec ça, même le Pape!


>> telle autre religion croit que le sida est causé par le
>> «péché d'homosexualité»

Ah oui? Laquelle? La religion catholique enseigne que le SIDA
est causé par un rétrovirus:

	"The etiologic agent of AIDS is HIV, which belongs to
	the family of human retroviruses and the subfamily
	of lentiviruses. [...] Electron microscopy shows that
	the HIV virion is an icosahedral structure containing
	numerous external spikes formed by the two major
	envelope proteins, the external gp120 and the trans-
	membrane gp41."
	[Harrison's Principles of Internal Medicine, 14th ed.,
	p. 1792]

Tzigidou!
Stefan

5.3) G. Loignon (2008-janvier-17)

Original de ce message sur le site de Guillaume.

-----Original Message-----
From: Guillaume Loignon
Sent: 17 janvier 2008 22:57
To: Stefan Jetchick
Subject: débat, 2e round

Salutations à Stefan, aux arbitres et tous les lecteurs,

Débutons par une petite récapitulation. [7] Si Dieu a créé la morale,
alors il a pu déterminer les règles de manière arbitraire (donc ce
ne serait plus de la morale) ou rationnelle. [8] S'il a «choisi» les
règles rationnellement, alors on peut également accéder à cette
morale par la raison, ce qui fait que la croyance en Dieu n'est pas
nécessaire pour agir moralement. Il semblerait que même le Pape est
d'accord sur ce point: tant mieux, voilà un morceau de moins à
débattre.

Arc-en-ciel

Un premier point de litige, si j'ai bien saisi le petit "conte" sur
l'évolution, est que c'est la raison, moteur de la moralité, qui
nécessite l'intervention divine. Sans Dieu, pas de raison: juste des
atomes qui entrent en collision, donc pas de morale. [Point J1A,
pour simplifier].

Suivez le lapin blanc

Pourtant, il y a abondamment de faits démontrant la théorie de
l'évolution, y compris l'évolution de la conscience. On peut
toujours postuler un "ingrédient magique" que possèderait l'humain
et ne pourrait provenir d'un processus évolutif, mais cela demeure
dans le registre des croyances; rien ne le démontre. Un autre
problème avec J1A: cet argument fait appel à un "god-of-the-gaps"
(ou Dieu bouche-trou). Ce n'est pas parce qu'on ignore encore les
détails de comment la conscience a émergé par évolution biologique
qu'il faut nécessairement postuler un Dieu, qu'en penses-tu? [9] Et que
dire des arcs-en-ciel: encore Dieu qui est dans le coup?

L'autre leçon que je retiens de ton voyage dans le chapeau vide est
que s'il n'y a pas de Dieu, alors la vie n'a pas de sens, donc pas
de moralité [argument J1B]. Si j'ai bien saisi, tu [présumes] que dans
le "chapeau" (le weltangschauung athée) la vie ne peut avoir de sens
puisque, encore une fois, c'est «juste» des atomes qui entrent en
collision.

Certes, à partir de tes propres définitions, il est aisé de dire que
sans Dieu la vie n'a pas de sens: après tout, dans ton livre il
semble que la question de «sens» est intimement liée à la foi
religieuse. Mais tous ne partagent pas ta vision des choses.
Personnellement, j'aime beaucoup mes atomes. J'adore l'idée d'être
composé de la même matière que le voisin, d'avoir la même origine
évolutive. Ça me fait réfléchir sur ma place dans l'univers,
m'incite à l'humilité et à l'ouverture. En revanche, je ne trouve
guère attirante cette idée chrétienne de [10] fantôme désincarné (l'âme)
qui hanterait un tas de viande (le corps). Postuler un «ingrédient
magique» transcendant n'ajoute rien, à mon avis, à la réalité de
l'expérience humaine. Au contraire, cela amoindrit l'existence en la
réduisant à une sorte de réalité virtuelle précédant la véritable
existence dans «l'au-delà».

Il y a environ 100 000 ans, suite au lent bricolage évolutif, l'homo
sapiens a émergé. Les premiers monothéismes datent d'il y a environ
6000 ans. Question: si Dieu et moralité vont de pair, comment avons-
nous survécu pendant ces 94 000 ans? Si la religion était la seule
porteuse de moralité, l'homo sapiens serait éteint depuis belle
lurette. En réalité, c'est grâce à de bonnes astuces si nous avons
survécu: le partage, la coopération, la réciprocité. La fitness
biologique de ceux qui employaient la règle d'or étant plus élevée
que celle des resquilleurs, l'évolution nous a rapidement dotés
d'une fibre morale, capable même de détecter les tricheurs. Contrairement
à la vision hobbesienne d'une nature humaine impitoyable, on réalise
vite qu'en fin de compte les bon gars finissent premiers.

Très cordialement,

Guillaume

5.4) S. Jetchick (2008-janvier-21)

Le super-héros des philosophes: Capitaine CONCEDO!
Le super-héros des philosophes: Capitaine CONCEDO!
(Source)

-----Original Message-----
From: Stefan Jetchick
Sent: 21 janvier 2008 14:34
To: Guillaume Loignon
Subject: RE: débat, 2e round

Bonjour à tous!

>> Débutons par une petite récapitulation.

Bonne idée!

N'oublions pas que notre but n'est pas de «noircir des pages»,
mais, comme le dit si bien M. Denis Labelle:

	«Dans l'espace abstrait des «propositions intéressantes», il
	y a donc, grosso modo, le pays de l'accord et le pays du désaccord.
	Après avoir planté quelques piquets-propositions dans le pays
	de l'accord et quelques autres dans le pays du désaccord, chacun
	essaie (par ses prochaines propositions) de promener le mieux
	possible sa «loupe mentale» aux alentours du mi-chemin entre
	les deux pays. Chacun essaie de cartographier les contours de
	la frontière étrange où nos opinions se détachent.»
	[FAQ de REDICO]

(C'est surprenant comme ce que dit M. Denis Labelle ressemble à ce
que dit le Capitaine CONCEDO. Aurions-nous enfin trouvé la
véritable identité du super-héros des philosophes?)

Examinons-donc ton dernier courriel, pour tenter de dénicher
tous nos points de convergence. (Ça prend du temps,
mais ça vaut la peine de faire un effort pour d'être d'accord avec
Guillaume Loignon!)


>> [7] Si Dieu a créé la morale, alors il a pu déterminer les règles
>> de manière arbitraire (donc ce ne serait plus de la morale)

Concedo!

Pour les spectateurs moins calés en philo, ici Guillaume démolit
le «volontarisme cartésien». Descartes disait que Dieu était tellement
«libre», que si Dieu avait voulu que 2 + 3 = 4, Il aurait pu le
faire!

Bien sûr, si tel était le cas, il faudrait dire adieu au
Principe de non-contradiction (donc il faudrait dire adieu
à la raison, et par conséquent adieu à la morale).


>> [8] [Si Dieu] a «choisi» les règles rationnellement, alors on
>> peut également accéder à cette morale par la raison

Concedo!

Guillaume, ici ta phrase est tellement importante qu'il vaut
la peine de s'y attarder un peu. En fait, je pense qu'elle
vaut à elle seule mon investissement de 1000$.

Lorsqu'une intelligence produit de l'ordre, on peut découvrir
les intentions de cette intelligence en examinant cet ordre.
Par exemple, en examinant une tondeuse à gazon, on peut déduire
des «Commandements» du Manuel de l'usager, comme:

	Tu ne mettras pas d'eau dans le réservoir d'essence.

	Tu ne mettras pas de sable dans le réservoir d'huile.

C'est sûr qu'on peut téléphoner à l'inventeur de la tondeuse
à gazon, pour qu'il nous dise directement comment bien s'en occuper.
Mais on peut aussi «lire le manuel» qui est implicitement «écrit»
dans la tondeuse elle-même.

(Bien sûr, il faut ensuite se poser la question: «Qui dit
que l'ordre que tu crois voir est meilleur que celui que je crois
voir?» Et encore plus important: «L'ordre peut-il surgir de rien?»
Mais attendons un peu avant d'explorer cette «frontière étrange».)


>> [9] "god-of-the-gaps" (ou Dieu bouche-trou). Ce n'est pas parce
>> qu'on ignore encore les détails [...] qu'il faut nécessairement
>> postuler un Dieu [...]

Concedo!

L'ignorance ne prouve rien. Pour affirmer que l'évolution n'explique
pas ceci ou cela, il faut non seulement montrer qu'on n'a pas
d'explication, mais aussi que ce n'est pas possible, en se basant sur
des principes encore plus certains.


>> [10] fantôme désincarné (l'âme) qui hanterait un tas de viande (le corps)

Concedo!

J'aime ça quand tu tapes sur les erreurs de Descartes! En effet, pour
Descartes (et Platon, etc.) «l'âme» est une sorte de fantôme
totalement indépendant, uni (on ne sait pas pourquoi) à un corps
lui aussi indépendant.

Bon, je pense avoir épuisé les Concedo.

[Environ 400 mots ici]

Essayons maintenant de nous re-centrer sur le sujet
du débat.


>> Personnellement, j'aime beaucoup mes atomes.

Je n'ai jamais douté que tu avais des croyances et des
émotions personnelles.

Sauf que dans ce débat, tu dois plutôt démontrer rationnellement
l'existence de préceptes moraux non-arbitraires obligatoires
pour tous.


>> on réalise vite qu'en fin de compte les bon gars
>> finissent premiers

Ah oui, vraiment?

Joseph Staline est mort de vieillesse, après une longue vie
pleine de «réussites». Idem pour l'ayatollah Khomeini, Pol Pot,
Ferdinand Marcos, etc.

N'oublie pas non plus que le Thomas Hobbes de ta «vision hobbesienne»
a écrit son Leviathan pendant la Guerre civile anglaise
(1642-1651), où les massacres, pillages, épidémies, etc., lui ont
fait dire:

	«Life under mob rule is solitary, poor, nasty, brutish
	and short».

Et si après tout ça, un petit clown aux USA ou en Russie appuie
sur le bouton? Hop, cataclysme nucléaire mondial. Tout le monde
est mort.

En d'autres mots, je pense ici que tu t'éloignes un peu trop des
faits.

Par contre, tu es tout-à-fait logique avec toi-même. Un athée
matérialiste va avoir tendance à réduire la morale à «ce qui
s'adonne à arriver», plutôt que «ce qu'on a le devoir de faire,
coûte que coûte, même si on est faible et que le plus fort va
gagner, même si on doit mourir en essayant».


>> il y a abondamment de faits démontrant la théorie de
>> l'évolution

Distinguo.

D'abord, il y a bien plus qu'une théorie de l'évolution! Il y en
a plusieurs! (par exemple, évolutionnisme ou monisme, transformisme
universel, transformisme mitigé, etc.)

Dans ton cas, tu sembles confondre «évolution biologique» et
«monisme philosophique». Pour le voir, va au laboratoire de
biologie de ton université, et tente de voir les énoncés suivants
dans un microscope:

	[13] Seule la matière existe; une chose ne peut pas exister
	sans être matérielle.

	[14] Toute information qui ne provient pas de nos sens
	externes (vue, odorat, toucher, etc.) est fausse et
	non-scientifique.

	[15] On peut donner ce qu'on a pas. Du non-être peut surgir
	spontanément l'être. Le moins explique le plus.


Ces énoncés sont des positions philosophiques, pas des constatations
biologiques.

Par exemple, le [14]: en ce moment, tu lis ce texte, tu comprends
mes mots, tu sais que tu es «Guillaume Loignon». Cette information
ne te vient pas de tes sens externes. Tu constates évidemment que
tu es une personne, libre et raisonnable. C'est vrai, mais
ça ne ce voit pas au microscope, ni au tomographe par émission de
positons.

Le [15] exige qu'on abandonne le Principe de non-contradiction,
et donc la raison.

Le [13] est une pure affirmation sans fondement. On voit bien que
le concept d'être, d'avoir un rapport à l'existence, n'est
pas nécessairement limité à la matière. Y a-t-il plus que la
matière? Aucun microscope ne peut nous le dire. Mais réfléchir
aux numéros [14] et [15] peut nous ouvrir des portes.


>> [11] il y a abondamment de faits démontrant [...] l'évolution de
>> la conscience

Nego.

[12] On peut au contraire prouver que la matière ne peut pas devenir
consciente.

Pour ce faire, il faut commencer par augmenter notre bagage
philosophique. Oui, Descartes à parlé de l'âme, mais très mal.
D'autres avant lui (Aristote) ont dit des choses bien plus
cohérentes. J'imagine que tu te destines à l'enseignement de
la philosophie? Alors, pour le bien de tes étudiants,
tu as le devoir de lire attentivement une demi-douzaine de
pages qui résument Aristote:

	L'âme de la coquerelle


En terminant, merci Guillaume une fois de plus d'être mon
partenaire d'entraînement. Tu me force à réfléchir
sérieusement à des questions très importantes.

Au plaisir de ferrailler avec toi!

Stefan



==============================================================
Quelques répliques point-par-point (facultatif)


>> Il y a environ 100 000 ans [...] l'homo sapiens a émergé.
>> Les premiers monothéismes datent d'il y a environ 6000 ans.

Je ne connais pas de bon livre de paléoanthropologie. Si tu en
as un à me suggérer, je serais reconnaissant. J'aimerais
bien savoir comment on fait pour déterrer un bout de crâne
vieux de 100 000 années, et de voir sous le microscope s'il
était bi-théiste ou tri-théiste, mais pas monothéiste. (Et
tant qu'à y être, s'il était vraiment libre et raisonnable.)

Pour ce qui est de la date de promulgation de la loi morale
naturelle, elle coïncide avec l'apparition de l'homme (voir
ci-haut la métaphore du «Manuel de l'usager» implicitement
«écrit» dans la tondeuse elle-même).


>> J'adore l'idée d'être composé de la même matière que le voisin
>> [...] Ça [...] m'incite à l'humilité

Les chrétiens aussi savent que: «Tu es poussière, et tu retourneras
à la poussière» [Gn 3:19]. Sauf que les matérialistes athées vont
plus loin encore:

	bouse de vache + temps + hasard = mon voisin

Et comme le hasard n'est rien au fond, et que le temps n'a
d'autre réalité que celle du mouvement lui-même, alors
l'équation se réduit à:

	bouse de vache = mon voisin

Disons que ça ne donne pas des raisons solairement évidentes
pour respecter son voisin!

;-)


>> Au contraire, cela amoindrit l'existence en la
>> réduisant à une sorte de réalité virtuelle précédant la véritable
>> existence dans «l'au-delà».

Ce n'est pas un débat sur la religion catholique, mais quand tu
lances de la boue comme ça, il faut que je réagisse un peu!

Si tu enlèves tes oeillères athées un instant, et que tu vas
lire la vie du gars que les chrétiens doivent imiter ici-bas,
tu vas voir qu'il n'est pas question d'«amoindrir l'existence»
ici-bas! Au contraire, si on ne vit pas notre existence ici-bas
au maximum, alors notre existence dans l'au-delà est foutue!
(«Car j'ai eu faim et vous m'avez donné à manger; j'ai eu soif et
vous m'avez donné à boire [...] tout ce que vous avez fait à l'un
de ces petits qui sont mes frères, c'est à moi que vous l'avez fait.»
[Mt 25:31-46])


En passant Guillaume, une «bonne soeur» qui lit tes textes
m'a demandé de te demander pourquoi tu étais devenu athée.
(Remarque l'approche féminine à laquelle je n'aurais jamais
pensé. Trop occupé à me battre pour m'apercevoir que mon
adversaire aussi est une personne humaine! ;-)

5.5) G. Loignon (2008-janvier-29)

Original de ce message sur le site de Guillaume.

Il y a beaucoup, beaucoup de choses à traiter ici. Je vais opter
pour ton style, question de couvrir plus de terrain.

>> [J2.1] Sauf que les matérialistes athées vont plus loin encore:
>> bouse de vache + temps + hasard = mon voisin

Nego. L'évolution n'est pas le fruit du hasard.
[16] La sélection naturelle ne fonctionne pas par hasard.

>> [J.2.5] D'abord, il y a bien plus qu'une théorie de l'évolution! Il
>> y en a plusieurs! (par exemple, évolutionnisme ou monisme,
>> transformisme universel, transformisme mitigé, etc.)

En sciences, la théorie concernant l'origine des espèces
est actuellement celle-ci: la théorie synthétique de l'évolution,
ou néo-darwinisme. Attention de ne pas confondre théorie (au sens
scientifique) avec hypothèse ou doctrine.

>> [J2.2] On peut au contraire prouver que la matière ne peut pas
>> devenir consciente.

Nego. Que manque-t-il à la matière pour qu'elle soit consciente?
Quel est l'ingrédient magique non-matériel, et qu'est-ce qui prouve
l'existence dudit ingrédient? (Aussi: si un humain n'a pas cet
ingrédient, ai-je le droit de le tuer?)

>> [J2.3] [Les athées matérialistes affirment que:] Seule la matière
>> existe; une chose ne peut pas exister sans être matérielle. Toute
>> information qui ne provient pas de nos sens externes (vue, odorat,
>> toucher, etc.) est fausse et non-scientifique. On peut donner ce
>> qu'on a pas. Du non-être peut surgir spontanément l'être. Le moins
>> explique le plus.

[17] On peut jouer longtemps sur le sens du mot «exister». Est-ce que
le bleu existe? Est-ce que le verbe exister existe?

Ensuite, [18] l'information ne provient pas toujours des sens. La
réflexion aussi permet d'engendrer de nouvelles informations.
L'accusation est donc sans fondement.

Je semble par ailleurs déceler ici une défense de la révélation
comme source valable d'information. Qu'est-ce qui démontre la
validité de ce genre de sources? En quoi la révélation telle que
définie par la religion catholique est-elle supérieure à la
taromancie? Peut-on le démontrer?


>> [J2.4] Par contre, tu es tout-à-fait logique avec toi-même. Un athée
>> matérialiste va avoir tendance à réduire la morale à «ce qui
>> s'adonne à arriver», plutôt que «ce qu'on a le devoir de faire,
>> coûte que coûte, même si on est faible et que le plus fort va
>> gagner, même si on doit mourir en essayant».

Nego. N'oublions pas que [19] l'évolution fonctionne à partir de groupes
de population, pas d'individus. L'esprit de sacrifice et l'altruisme
sont donc tout à fait cohérents avec l'évolution. Les accidents de
l'histoire (Staline et cie) semblent en fait parasiter cet instinct
en détournant l'amour du prochain en un amour de la Patrie, du
Régime, du Gourou, etc. Ce n'est pas parce que c'est «juste» de la
matière qu'il faut pour autant agir avec violence. Et puis si "tout
le monde meurt" suite à la pression d'un bouton, ce n'est pas très
bon côté survie de l'espèce, non?

Prenons un exemple. Si je jette un oiseau empaillé, sa trajectoire
suivra exactement une courbe décrite par les lois de la balistique.
À ce moment-là, c'est «juste» de la matière. Mais pas si je lance
un oiseau vivant, le comportement du projectile sera beaucoup plus
complexe, puisqu'on a affaire à un être conscient. C'est de la
matière, mais pas «juste» de la matière. C'est de la matière
organisée et dotée de conscience. [20] Pour mes amis de la Polytechnique,
tant qu'ils sont en train de concevoir un avion ou un pont, un
humain = un tas de matière avec un poids X et un volume Y. Mes amis
en psychologie, eux, ont une tout autre conception de l'humain, et
mes amis d'anthropologie pensent encore autrement. Qui a raison? Ils
ont tous raison, chacun à un différent niveau de compréhension.

Les actes cruels comme brûler un homme vivant confondent une
compréhension élémentaire de l'homme (il est surtout composé
de carbone, donc il brûle) avec une compréhension plus
"macroscopique" (il a des intentions, une conscience, une volonté,
etc.)

Finalement, un petit conte amusant sur le dogmatisme.

Le mystère de la tondeuse à gazon

Je reprends ton analogie. Pour bien utiliser la tondeuse, on peut
faire trois choses:

	- Téléphoner au fabricant
	- Consulter le manuel
	Découvrir son fonctionnement en étudiant la structure de la tondeuse


Je tente les trois voies.

	1) Le fabricant ne répond pas. Il y a seulement un représentant
	non officiel qui exige que je lui embrasse les fesses avant de
	me donner des instructions floues et contradictoires.

	2) Le manuel, bien qu'il soit utile dans certains cas, concerne
	une tondeuse construite il a quelques siècles! Il donne par
	ailleurs, dans ses premiers chapitres,
	plusieurs instructions interdites par la loi canadienne.

	3) C'est difficile au début, mais je réalise que même ceux qui
	prétendent faire 1 et 2 font en réalité 3. Je m'inspire d'eux
	ainsi que de mes découvertes. Le gazon est tondu, quelle joie!
	:)

[21] Morale de cette histoire: les dogmes ne tondent pas le gazon. Mais,
en tant qu'engrais naturel, le font peut-être pousser mieux.

:)

Très cordialement,
GL

5.6) S. Jetchick (2008-février-05)

Jetshrek
Jetshrek
(Image © www.dreamworksanimation.com)

Bonjour à tous!

Mon courriel se divise en 7 parties:

	1) La récolte des «Concedos» du courriel précédent

	2) Nouvelle tentative de re-centrer le débat

	3) Le monisme philosophique et l'évolution biologique

	4) L'existence mentale et le libre-arbitre

	5) Sans Dieu, le bien et le mal peuvent-ils exister?

	6) Réplique aux dernières attaques contre le catholicisme

	7) «Carton jaune» à Guillaume pour non-respect des règlements?


=================================
1) La récolte des «Concedos» du courriel précédent

Comme d'habitude, nous commençons avec «la chasse aux Concedos»,
cet effort honnête et sérieux pour chercher des choses sur
lesquelles ont s'entend, afin de les «engranger» précieusement.


>> [16] La sélection naturelle ne fonctionne pas par hasard.

Concedo, bien sûr!

Je m'excuse, j'aurais dû indiquer plus clairement mon
intention. Je voulais attirer ton attention sur le problème
de l'origine de la dignité humaine, dans l'hypothèse du
monisme philosophique, pas faire une description technique
des mécanismes du transformisme mitigé!

Je vais reparler ci-bas de ces deux sujets (sans
ambiguïté cette fois-ci, je l'espère!)


>> [17] On peut jouer longtemps sur le sens du mot «exister»

Concedo.

Si on ne fait pas attention à ces différents sens, on tombe
dans des paradoxes comme celui-ci:

	«Il faut admettre que le non-être est le non-être.
	Or tout ce qui est est réel et existe.
	Donc le non-être est réel et existe.»
	[Gorgias de Léontini]

Dans ce célèbre sophisme, on joue sur deux sens:
«être de raison», et «être transsubjectif, extramental».
Bien sûr, il ne faut pas «jouer» sur les sens du mot «être», mais
les distinguer, et ensuite répondre sérieusement à l'objection
No. [13]. J'en reparlerai ci-bas.


>> [18] l'information ne provient pas toujours des sens. La
réflexion aussi permet d'engendrer de nouvelles informations.

Concedo! Merveilleux, on va explorer cette affirmation
ci-bas.


>> [19] l'évolution fonctionne à partir de groupes
de population, pas d'individus.

Concedo.


>> [20] Pour mes amis de la Polytechnique,
>> tant qu'ils sont en train de concevoir un avion ou un pont, un
>> homme = un tas de matière avec un poids X et un volume Y. Mes amis
>> en psychologie, eux, ont une tout autre conception de l'homme, et
>> mes amis d'anthropologie pensent encore autrement. Qui a raison? Ils
>> ont tous raison, chacun à un différent niveau de compréhension.

Concedo.

Par contre, je ne suis pas sûr comment résumer ça en une phrase.
Les Anciens philosophes auraient dit: «L'homme est un microcosme»,
c'est-à-dire que l'homme est comme un résumé de toutes les
merveilles de l'univers visible, qu'on peut étudier en «couches»
successives, comme la physique, la chimie, la biologie, la psychologie,
la sociologie, etc.

Si tu n'es pas d'accord avec ma façon de résumer ton énoncé
[20] dans le Résumé, dis-le moi. (Bien sûr,
il faut aussi se demander si une telle masse écrasante de beauté et
d'ordre peut venir de rien, mais on va reparler du No. [15] ci-bas.)


>> [21] les dogmes ne tondent pas le gazon. Mais,
>> en tant qu'engrais naturel, le font peut-être pousser mieux

Concedo, mais strictement parlant, tu es trop gentil
ici.

N'oublions pas que notre hypothèse, dans ce débat, est que Dieu
n'existe pas. Comme un dogme est défini comme étant une affirmation
qui est absolument vraie, car elle vient de Dieu (qui ne peut tromper
ou être trompé), alors (selon notre hypothèse) un dogme n'est pas
quelque chose d'utile comme de l'engrais, mais bien un pur mensonge,
quelque chose qui n'a aucune utilité.

Permets-moi de me citer moi-même, à l'appui de ton affirmation:

	«Un faux dogme ne doit pas être nommé dogme, mais
	bien mensonge.»
	[Le «fondamentaliste» catholique, et la pelle à neige]

et encore:

	«Lorsqu'un simple mortel prétend être Dieu, ou prétend avoir
	parlé à Dieu alors que cela n'est pas le cas, des choses
	mauvaises s'ensuivent. La vérité est bonne, et le mensonge est
	mauvais, et les mensonges mènent souvent à la violence.»
	[Dieu ne s'appelle pas Allah, et Mahomet n'est pas son prophète]


=================================
2) Nouvelle tentative de re-centrer le débat

Maintenant, revenons à nos moutons. Le sujet de ce débat
n'est pas: «Les enseignements de l'Église catholique sont-ils
bons ou mauvais?» (Même si tous les enseignements de l'Église
étaient pourris jusqu'à la moëlle, cela ne changerait rien à
notre débat.) Le sujet est: «En supposant que Dieu n'existe
pas, le bien et le mal peuvent-ils exister?»

De quel «bien» et «mal» parle-t-on? Du bien et mal physique?
Pensons-y. Si on se pince, ça fait «mal». Tentez ici et maintenant
cette expérience: hop! pincez! ... Ouille! Mais si on boit une bonne
tasse de café double-crème-double-sucre... Mioum! C'est «bon»!

Ces sensations de plaisir et de douleur sont communes à tous
les animaux, et peuvent être retracées à des «centres de plaisir
et de douleur» dans le cerveau. En théorie, on pourrait permuter
les «fils», un peu comme brancher le tuyau d'eau froide sur
le robinet d'eau chaude et inversement (Oups! oui, j'ai déjà
fait ça!)

Si on présumait que notre débat parlait du bien et du mal
physique, alors il suffirait de permuter les fils dans
le cerveau de quelqu'un, pour qu'un pompier héroïque qui
sauve une mère et ses enfants soit «mauvais», et que les camps
de concentration pleins de cadavres soient «bons»!

Il est donc clair que dans ce débat nous ne parlons pas du bien et du
mal physique, mais du bien et du mal moral. Même si un
Staline ou un Pol Pot éprouve beaucoup de plaisir à tuer des gens,
nous allons dire qu'il agit mal. Même si un acte nous cause beaucoup
de souffrances (comme entrer dans une maison en feu pour secourir une
mère avec ses enfants), nous avons le devoir d'endurer cette
souffrance, et même de mourir en essayant de les sauver.

C'est de cela dont on parle. C'est ce bien et ce mal moral
qu'il faut «faire surgir comme un lapin», après avoir
soigneusement vérifié que Dieu «n'est pas dans le chapeau».

Comme je l'ai dit dans mon premier courriel,
pour faire surgir ce lapin de ce chapeau il faut (entre autres)
trouver:

	[22] D'où va venir la dignité humaine?

	[23] D'où va venir l'obligation morale, le «devoir»?

	[24] D'où vont venir l'intelligence et le libre-arbitre
	nécessaires pour avoir un «agent moral»?


Jusqu'ici, Guillaume semble centrer sa réponse sur la matière
et l'évolution. Ré-examinons ces deux sujets.


=================================
3) Le monisme philosophique et l'évolution biologique

J'ai prétendu dans mon dernier courriel qu'il y a une différence entre
le monisme philosophique et l'évolution biologique.
Pour le prouver, j'ai demandé à Guillaume de retrouver ces trois
affirmations dans la science biologique:

	[13] Seule la matière existe; une chose ne peut pas exister
	sans être matérielle.

	[14] Toute information qui ne provient pas de nos sens
	externes (vue, odorat, toucher, etc.) est fausse et
	non-scientifique.

	[15] On peut donner ce qu'on a pas. Du non-être peut surgir
	spontanément l'être. Le moins explique le plus.


Guillaume prétend être d'accord avec le No. [14], donc on va
l'examiner dans la partie suivante de mon courriel. Par contre,
il n'a pas indiqué où en biologie on pouvait retrouver les
Nos. [13] et [15].

Au No. [13], il dit que les mots comme «être» ont plusieurs
sens. Oui, mais Aristote les a bien énumérés et délimités il y
a plus de deux mille ans. (Sent. Metaph., lib. 4 l. 1 n. 7
et L'Analogie de l'être). L'ignorance des rudiments
de l'histoire de la philosophie n'est pas une excuse pour
éviter une question sérieuse.

On constate qu'il y a des êtres qui existent en réalité (roche,
pomme, chien, etc.), et d'autres qui existent seulement dans
notre raison (comme le concept de non-être, etc.). On constate
aussi que la notion d'être n'a pas de limite intrinsèque, et
on conçoit facilement qu'un être puisse exister réellement,
sans pour autant être matériel. (Remarquez le verbe «concevoir»
et non pas «imaginer». L'intelligence n'est pas la même chose
que l'imagination.) Concevoir un tel être signifie-t-il qu'il
existe, d'une existence extramentale, transsubjective? Non,
bien sûr. Mais cela ne prouve pas non plus que ce soit impossible.

Tous les êtres sont-ils matériels? Le biologiste compétent répond:
«Ce genre de question n'est pas dans mon département; je n'ai pas
les outils pour répondre à ce genre de question.» L'expression
«matérialisme scientifique» est trompeuse. Le matérialisme
est une position philosophique, pas une constatation biologique.

Pour ce qui est du No. [15], Guillaume a complètement évité la
question. Pourtant, si on accepte [15], on doit rejeter la raison et
la science. Le monisme philosophique pose le No. [15] en postulat,
mais la science biologique constate au contraire que tout effet a
une cause. Même pour avoir un tout petit peu d'évolution biologique,
il faut déjà avoir un formidable système d'une complexité
ahurissante (biosphère adaptée à la vie, ADN, population de cellules
vivantes elles-mêmes d'une complexité effarante, protéines
fabriquées avec des séquences de repliement dignes d'un ballet
chorégraphié, etc.). Même la planète terre sans la vie serait déjà
un système d'une très grande complexité (hydrosphère, atmosphère,
sols, tectonique des plaques, roches ignées, sédimentaires,
métamorphiques, volcans, etc.). Et que dire des atomes! Quelle
ahurissante complexité même dans un bête petit atome! Qu'est-ce
qu'un électron? D'où vient la force nucléaire forte? Etc., etc.

À chaque fois qu'on semble s'approcher d'une explication simple d'un
phénomène naturel, on dirait que c'est comme une «poupée russe» (ou
«poupée gigogne»), on trouve d'autres niveaux d'ordre
fantastiquement organisés. Mais d'où vient tout cet ordre? C'est à
tout le moins une question intéressante!

Les sciences expérimentales (incluant la biologie) n'affirment
pas le No. [15]. Au contraire, elles prennent pour acquis
exactement le contraire: si un effet se produit, il y a une
raison suffisante qui l'explique. Donc, ils cherchent la cause.

Remarquez bien que, par mon objection [13-14-15], je ne prétends
pas prouver l'existence des esprits ou de Dieu. Je ne fais que
signaler que le monisme philosophique existe, et qu'il n'est
pas une constatation des sciences expérimentales comme la
biologie ou la physique, mais bien une position philosophique.
Cette position philosophique est-elle vrai? Pour le savoir, il
faudra l'examiner, et non pas la présumer vrai en se basant
sur les préjugés du scientisme.


=================================
4) L'existence mentale et le libre-arbitre

Guillaume semble ouvrir une porte avec son affirmation No. [18]:

	[18] l'information ne provient pas toujours des sens. La
	réflexion aussi permet d'engendrer de nouvelles informations.


Faisons un peu d'introspection, pour constater de nouveaux
faits qui peuvent être aussi scientifiques que ceux qu'on
observe dans un microscope. (En effet, Guillaume a dit «Nego» à
l'affirmation No. [14], qui, elle, dit que les faits
d'introspection sont nécessairement non-scientifiques.)

Excusez le style de ce texte, il est écrit pour des pré-ados:

	«Premièrement, baisse un peu la tête... Deuxièmement, prends ta
	tête entre tes mains, un peu comme si ta tête était un ballon de
	soccer... Troisièmement, ferme tes yeux... (Non, non! Il ne faut
	pas tricher! Enfin, moi j'ai le droit de tricher, parce que je
	dois lire mon discours!) Quatrièmement, pense silencieusement...

	Pense comme c'est fascinant d'être une personne! En ce
	moment même, tu existes. Bien sûr, tu existes en tant que corps
	(tu peux encore sentir ton ballon de soccer, je veux dire, ta
	tête, entre tes mains). Mais tu as une autre sorte d'existence:
	l'existence en tant que personne. C'est difficile
	d'expliquer ça avec des mots, mais essayons quand même (mais
	n'ouvre pas tes yeux encore). Non seulement tu m'entends parler,
	mais tu peux aussi entendre «le toi en-dedans de toi».
	Peut-être que pendant que tu m'écoutes, tu te dis aussi qu'il
	est bizarre de fermer ses yeux durant une conférence, ou peut-
	être que tu te dis que c'est drôle de se tenir la tête comme un
	ballon de soccer! Mais en tous les cas, tu penses.

	Non seulement est-ce que tu peux penser, mais tu peux aussi
	agir. Par exemple, tu peux décider de t'ouvrir les yeux
	et de lâcher ta tête. (Oui, tu peux faire ça maintenant. Vas-y
	et ouvre tes yeux.) Qui a décidé d'ouvrir tes yeux? C'est encore
	ce mystérieux «toi». C'est tout aussi merveilleux que ta
	capacité de penser. Tu peux décider de faire quelque chose, sans
	que quelque chose ou quelqu'un te le fasse faire, sauf le «toi»
	en-dedans de toi. Un ballon de soccer n'est pas comme ça. Un
	ballon de soccer va seulement bouger si tu lui donnes un coup de
	pied. Le ballon de soccer ne peut pas «se botter lui-même»! Mais
	toi tu peux «te botter toi-même»! Tu peux être assis là, au
	milieu du terrain de soccer, en train de profiter du beau
	soleil, puis soudainement te souvenir que ta Maman est très
	fatiguée parce qu'elle a le rhume. Alors tu peux décider de te
	lever et de revenir à la maison en courant, pour l'aider à faire
	le souper. En d'autres mots, tu as ce qu'on appelle la «volonté
	libre».»
	[Source]

Ce sont des faits, des faits que n'importe qui peut constater
avec évidence. Maintenant, il faut essayer de rendre compte de ces
faits scientifiquement.


>> >> [12] On peut au contraire prouver que la matière ne peut pas
>> >> devenir consciente.
>>
>> Nego. Que manque-t-il à la matière pour qu'elle soit consciente?
>> Quel est l'ingrédient magique non-matériel, et qu'est-ce qui prouve
>> l'existence dudit ingrédient?

Ici Guillaume, c'est presque de la malhonnêteté intellectuelle
de ta part. J'ai tout fait pour te faire cliquer sur l'hyperlien
suivant:

	«... pour le bien de tes étudiants, tu as le devoir
	de lire attentivement une demi-douzaine de pages qui résument
	Aristote: L'âme de la coquerelle»

Le mot «Nego» en latin ne signifie pas: «Je n'ai pas la moindre
envie d'aller lire la preuve que tu offres pour appuyer ton
affirmation, alors je vais prétendre que tu n'as pas de preuves.» Si
tu avais cliqué sur l'hyperlien, tu aurais eu accès d'abord à mon
bref résumé, mais ensuite à un Manuel de 2000 pages, qui contient
tout un chapitre consacré à la preuve de la spiritualité de l'âme
humaine (sans faire appel à la Révélation, évidemment!).

Pour rendre ta mauvaise volonté encore plus manifeste, si tu
avais cliqué sur cet hyperlien, tu aurais vu que même Aristote
est d'accord avec le sujet de ta propre thèse de maîtrise! («Can
scientific materialism explain emotions»).

Incroyable. Un «Concedo» gros comme un éléphant te pend au bout
du nez, et tu ne le vois pas!

Je ne vais pas recopier ici les 2000 pages, mais je peux donner
un petit avant-goût (N'oublie pas que ce passage présume
de nombreuses notions établies précédemment):

	«a) FAITS. Nous avons constaté, dans notre conscience
	intellectuelle, le pouvoir de se prendre elle-même comme objet
	de connaissance par une réflexion au sens strict.

	b) PRINCIPE. Or la réflexion sur soi-même est impossible à une
	activité corporelle ou organique et exige la spiritualité: En
	effet, toute activité corporelle suit évidemment les lois de la
	matière dont la première est d'agir nécessairement par contact
	local, comme nous l'avons montré [§324].

	Or tout contact quantitatif suppose par définition, deux parties
	extérieures l'une à l'autre («partes extra partes»): il devient
	impossible de réaliser une opération toute immanente où le
	principe actif et l'objet de l'action se recouvrent totalement
	et parfaitement l'un l'autre, comme dans la réflexion parfaite.
	Il est impossible qu'une faculté organique agisse et en même
	temps se regarde agir, disait A. Comte. Aussi, par
	toutes nos fonctions sensibles, ou bien nous prenons conscience
	d'un objet distinct de nous: chose perçue hors de nous, souvenir
	ou image reproduite; ou bien nous voyons en nous un autre fait
	de conscience, mais sans jamais avoir conscience de l'acte même
	de conscience.

	Donc la pensée ainsi transparente à elle-même par réflexion
	stricte est une activité spirituelle.»
	[Source]

On peut faire un raisonnement similaire avec la liberté. Lorsqu'on
agit normalement (adulte en santé, non perverti de vices, etc.), on
«voit» avec évidence que c'est nous-mêmes qui nous déterminons à
agir. Notre «moi» est «transparent à lui-même», et on voit que la
cause de notre agir est notre décision libre.


>> [...] un oiseau vivant [... est] de la matière
>> organisée et dotée de conscience

Ici, il faut faire attention aux mots. «Conscience» vient du latin
«cum-scientia», la «connaissance avec». Avec quoi? Avec la
connaissance qu'on est en train de connaître!

Au sens strict, il y a une différence entre un être doué de sensation
et d'instinct, et un être doué de conscience. Un oiseau peut clairement
percevoir ce qui l'entoure, et réagir avec instinct. Ma machine à laver
aussi peut percevoir quand j'appuie sur ses boutons, et réagir en
conséquence. Donne-moi suffisamment de robinets et de boyaux d'arrosage,
et je vais te programmer un singe qui va faire des choses
fantastiques, incluant toutes les émotions (peur, désir, douleur,
audace, etc.)

Mais si un singe (ou un oiseau, ou un dauphin, etc.) était
vraiment conscient, il serait une personne, et se poserait
des questions comme: «Mais qui suis-je? À quoi sert ma vie?
Pourquoi la mort?» Ce singe lirait des livres de philosophie,
écouterait Jean-Sébastien Bach, et suivrait avec intérêt notre
débat. Or, combien de singes suivent notre débat?

Reprenons encore le thème de la conscience et du libre-arbitre,
mais cette fois-ci en lisant l'article auquel tu réfères dans
ton 2e courriel: Evolutionary Psychology: A Primer,
par Cosmides et Tooby.

Si je devais colorier cet article en rouge, jaune et vert,
je pense qu'environ 90% serait en vert (la couleur «Concedo»).
Les scientifiques ont bien le droit d'étudier ce qu'ils
veulent, avec les hypothèses qui leur semblent les plus
prometteuses, et en faisant abstraction de ce qu'ils ne
veulent pas étudier. Par exemple, un biomécanicien peut
bien étudier seulement le genoux humain, et faire abstraction
du reste. Oui, oncle Jérôme qui souffre du genoux est bien
plus qu'un simple genoux, mais le biomécanicien en fait
abstraction.

Cosmides et Tooby ne font rien de mal en étudiant le comportement
humain ainsi:

	«- Where in the brain are the relevant circuits and how,
	physically, do they work?
	- What kind of information is being processed by these circuits?
	- What information-processing programs do these circuits embody?
	- What were these circuits designed to accomplish (in a hunter-
	gatherer context)?»
	[Cosmides et Tooby]

C'est un sujet de recherche très prometteur. Même Aristote, qui
avait prouvé la spiritualité de l'âme humaine il y a plus de deux
mille ans, serait d'accord. Il disait en effet qu'il est aussi
ridicule de dire que l'homme pense avec son âme, que de dire que
l'homme joue au hockey avec son âme (ou tisse avec son âme). L'homme
pense avec toute sa personne, corps et âme.

Le problème de Cosmides et Tooby, c'est qu'ils posent en pur
postulat que notre intelligence et notre volonté s'expliquent
par la seule matière. Jamais ils n'offrent le moindre argument pour
appuyer ce postulat. Jamais ils n'examinent les faits
d'introspection énumérés ci-haut, même si leur article a plus de
15000 mots (tous lus attentivement par Jetshrek, bien sûr!)

Remarque ici leur préjugé:

	«The brain is a physical system whose operation is governed
	solely by the laws of chemistry and physics. What does this
	mean? It means that all of your thoughts [...] are produced
	by chemical reactions going on in your head»
	[Cosmides et Tooby]

C'est simplement posé. Ils ne justifient nulle part cette
adéquation totale entre «machine» et «pensée et liberté».
Ils parlent en long et en large de choses qui sont tout-à-fait
matérielles (vision, attirances sexuelles innées, émotions, etc.)
et posent en postulat que l'intelligence et le libre-arbitre
aussi sont comme ça. Ils n'examinent jamais les faits, et ne
se demandent pas non plus quel principe ontologique peut expliquer
ces faits.


=================================
5) Le bien et le mal peuvent-ils exister, si on suppose
   que Dieu n'existe pas?

Récapitulons. Primo, contrairement à ce que Guillaume
affirme, le monisme n'est pas la même chose que l'évolution
biologique, mais au contraire est une position philosophique. Le
monisme doit être justifié rationnellement, plutôt que simplement
présumé sous prétexte que la biologie l'enseigne.

Secundo, contrairement à ce que Guillaume affirme, il
est loin d'être évident que la raison et le libre-arbitre
s'expliquent par la seule matière. Même l'article écrit par
les «gurus» de la «Psychologie Évolutive» n'ose même pas
examiner ce sujet. Or, pas de libre-arbitre, pas de morale...

Reprenons le No. [23]:

	[23] D'où va venir l'obligation morale, le «devoir»?

La morale n'est pas descriptive. Elle est prescriptive. Elle
enseigne ce qu'il faut faire, notre devoir. Or l'évolution
n'est pas prescriptive:

	«Evolution is descriptive. It tells how things are, not how they
	should be.»
	[CA002]

	«Natural selection does not work "for the good of the species"»
	[Cosmides et Tooby]

	«Evolution is not goal-oriented [...] the appearance of
	an evolutionary trend does not imply that there is some
	intrinsic drive toward a particular phenotype.»
	[Biology, by Campbell and Reece, 7th ed., p. 488]


Pour que la morale ait des fondements, il faut démontrer
rationnellement des énoncés métaphysiques du genre:

	[25] L'espèce humaine doit survivre, et non seulement
	survivre corporellement, mais encore développer au
	maximum toutes ses potentialités en art, en science,
	en politique, en philosophie, etc.

	[26] Non seulement l'espèce, mais même chaque individu
	de l'espèce a une valeur presque infinie, qui
	doit être respectée de tous. Et non seulement
	dans sa vie corporelle, mais aussi dans son droit à la
	vérité, à l'amour, etc.


Face à tous ces arguments, Guillaume ne cesse de répéter des choses
comme «l'altruisme augmente notre valeur adaptative (biological
fitness)». Oui, une fourmi qui collabore avec une autre fourmi va
transporter plus de sable. C'est scientifique. Et alors? Qui
dit que la fourmi doit collaborer? Tout ce que l'évolution
nous dit, c'est que des fourmis qui collaborent vont avoir plus
de valeur adaptative. Si elles ne collaborent pas, elles vont
avoir moins de valeur adaptative. Qui dit que l'espèce des
fourmis doit primer, ou celle des dinosaures, ou celle des
hommes, ou celle de l'übermensch? Et pourquoi chaque fourmi
devrait-elle avoir une valeur quasi-infinie?

Entre la description et la prescription, il manque une
étape que Guillaume n'a pas encore fourni.

Non seulement Guillaume n'a pas encore fourni cette étape, mais
à deux reprises déjà, ses façons de parler montrent qu'il n'a
pas la moindre idée où trouver ce «chaînon manquant».

Dans mon courriel précédent, j'avais taquiné Guillaume en disant:

	Par contre, tu es tout-à-fait logique avec toi-même. Un athée
	matérialiste va avoir tendance à réduire la morale à «ce qui
	s'adonne à arriver»

Guillaume est encore revenu à la charge, cette fois-ci en disant
que Staline et Pol Pot ne sont que des «accidents de l'histoire»!
Des accidents! Aucune mention de «crimes abominables», ou
«d'actes gravement immoraux». Erreur d'inattention, ou simple
cohérence logique avec ses principes? Le bien et le mal existent-
ils, ou Staline et Pol Pot ne sont-ils que:

	«noise, which was injected by the stochastic components of
	evolution»?
	[Cosmides et Tooby]


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6) Réplique aux dernières attaques contre le catholicisme

>> En quoi la Révélation telle que définie par la religion catholique
>> est-elle supérieure à la taromancie? Peut-on le démontrer?

Regardons pour voir! Reprenons notre métaphore de la tondeuse.
Rappelons qu'on peut consulter le Manuel de l'utilisateur
(enseignements de l'Église catholique), ou découvrir son
fonctionnement en étudiant sa structure (saine philosophie,
non-embourbée dans les préjugés du scientisme).

Normalement, on ne toucherait pas au Manuel (car ce n'est pas
le sujet de notre débat), mais Guillaume insiste.

>> [«petit conte amusant sur le dogmatisme»]
>> Le Manuel [...] donne par ailleurs, dans ses premiers chapitres,
>> plusieurs instructions interdites par la loi canadienne.

Comme nous cherchons à démontrer la valeur de la religion
catholique (par rapport à la taromancie, etc.), nous devons
aborder ce problème scientifiquement. Quelle est la
science qui étudie les religions? La sociologie, plus précisément
la sociologie de la religion. Quel est un des premiers principes
que nous enseigne la science de la sociologie? Qu'il ne faut pas
plaquer nos préjugés sur les données expérimentales.

Par exemple, un sociologue sérieux, en voyant des hindous se
prosterner devant des rats, ne va pas se précipiter pour
écrire une thèse de doctorat intitulée: «Les hindous adorent
la saleté et les microbes!» En effet, les plus vagues notions
de méthode scientifique nous disent qu'entre les rats et la
thèse, il faut une autre étape!

Ainsi, ce sociologue va plutôt aller voir ces adeptes de
l'hindouisme, et va leur poser des questions du genre: «Pourquoi
vous prosternez-vous devant des rats?» Il va ensuite les écouter
soigneusement et prendre des notes. Bien sûr, cela ne veut pas dire
que le scientifique va être d'accord avec tout ce qu'il entend! Mais
il va respecter la méthode scientifique.

Appliquons ça à la religion. Un sociologue sérieux se demande: Quel
est le Manuel pour la «tondeuse», selon l'Église catholique? Il va
donc aller voir l'Église et lui poser des questions, pour ensuite
écouter soigneusement et prendre des notes. Il ne va pas feuilleter
la Bible distraitement, pour ensuite insulter tous les chrétiens
en affirmant que la Parole de Dieu est de la bouse de vache.

L'Église enseigne que la «tondeuse» a deux vitesses: une vitesse
naturelle, et une vitesse surnaturelle. Il y a donc deux Manuels,
le Deuxième venant abroger certaines parties du Premier.

Voici comment bien se servir de la tondeuse, en «vitesse
surnaturelle»:

	«Bienheureux les pauvres en esprit, car le Royaume des Cieux
	est à eux.
	Bienheureux les affligés, car ils seront consolés.
	Bienheureux les doux, ils posséderont la terre.
	Bienheureux ceux qui ont faim et soif de la justice, car ils
	seront rassasiés.
	Bienheureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde.
	Bienheureux les coeurs purs, car ils verront Dieu.
	Bienheureux les artisans de paix, car ils seront appelés
	fils de Dieu.
	Bienheureux ceux qui sont persécutés pour la justice, car
	le Royaume des Cieux est à eux.»
	[Mt 5:3-10, le début du célèbre Sermon sur la montagne]


J'imagine que c'est une question de goût, mais moi ça
me semble tout-à-fait divin comme Manuel. En tout cas, rien
de contraire aux lois canadiennes.

Regardons maintenant le Premier Manuel, celui pour la
«vitesse naturelle» (dans la 2e table, qui traite des relations
entre les hommes):

	«Honore ton père et ta mère.
	Tu ne tueras pas.
	Tu ne commettras pas d'adultère.
	Tu ne voleras pas.
	Tu ne porteras pas de faux témoignage contre ton prochain.
	Tu ne convoiteras pas la femme de ton prochain
	Tu ne désireras... rien de ce qui est à ton prochain.»
	[Dt 5:16-21]

Personnellement, je trouve que c'est un excellent résumé d'une
bonne partie de la Loi naturelle. Et bien sûr, rien de contraire
aux lois canadiennes là-dedans, non plus.

Remarque bien que les deux Manuels que je te présente ici
ne sont pas ceux que j'ai envie de te montrer. Ce sont ceux
qui sont enseignés officiellement par l'Église catholique.
Tu peux vérifier par toi-même:

	Le catéchisme de l'Église catholique


«Mais pourtant, me dira-tu, la Bible dit toutes sortes de choses
déguelasses et sanguinaires!» Non. Ton interprétation de la
Bible dit des choses mauvaises. Sauf que seule l'Église catholique
a le mandat divin pour interpréter correctement la Bible.

Si tu veux accuser la Bible de dire quelque chose de mauvais, il
faut donc que tu trouves cette chose mauvaise dans l'interprétation
officielle qu'en donne l'Église. (Je suis bien sûr disponible
pour défendre n'importe quel passage de la Bible, n'importe quand.
Mais c'est un travail d'exégèse qui exige certains prérequis de la
part de l'auditeur.)


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7) «Carton jaune» à Guillaume pour non-respect des règlements?

Un vieux dicton dit:

	«Une fois ça passe, deux fois ça lasse, trois fois ça casse.»

Voilà trois courriels que Guillaume enfreint des règlements de
ce concours, surtout le No. 6.1.1, qui lui-même réfère aux
Nos. 3, 4, 5 et 6.

Primo, c'est seulement moi qui fait des efforts pour trouver
des «Concedos». Nous devrions nous réjouir de trouver des choses sur
lesquelles nous sommes tous deux d'accord. Au contraire, extraire
des «Concedos» de Guillaume, c'est comme extraire des molaires sans
anesthésie.

Secundo, Guillaume ne semble pas lire sérieusement mes textes,
alors que moi je passe au peigne fin tous ses hyperliens. Non
seulement ça, mais en plus il se plaint que je ne prouve pas mes
affirmations!

Tertio, Guillaume s'éloigne régulièrement du sujet du débat.
Le débat ne porte pas sur les enseignements de l'Église.

Quarto, la vulgarité et le racisme anti-catholique ne
sont pas les bienvenus dans une société démocratique et
pluraliste. Le «petit conte amusant sur le dogmatisme» est
hors-sujet, anti-scientifique, vulgaire et insultant pour
tous les chrétiens.

En conclusion, je demande à nos trois distingués arbitres de
décerner un «Carton jaune» à Guillaume, en plus de le sommer
de s'excuser auprès de tous les chrétiens qui suivent ce
débat.

Que Dieu vous bénisse tous,

Stefan «Jetshrek»

5.7) Rapport d'arbitrage No. 1 (2008-février-12)

-----Original Message-----
From: Denis Labelle
Sent: 12 février 2008 16:13
To: stefan.jetchick; guillaume.loignon; Gildas Haméon; Jean Ouellette
Subject: Rapport d'arbitrage # 1

Sujet : Débat entre Guillaume Loignon et Stefan Jetchick.

Les trois arbitres ont jugé pertinent de présenter conjointement le bref
commentaire que voici:

Rapport d'arbitrage # 1:

Les arbitres signalent que le message du 5 février de Stefan Jetchick est
d'une longueur abusive, contrevenant à la convention initiale.

Gildas Haméon, Denis Labelle, Jean Ouellette (arbitres)

5.8) S. Jetchick sur le Rapport No. 1 (2008-février-12)

-----Original Message-----
From: Stefan Jetchick
Sent: 12 février 2008 17:26
To: Denis Labelle; guillaume.loignon; Gildas Haméon; Jean
Ouellette
Subject: Commentaires de S. Jetchick sur le Rapport d'arbitrage # 1

Je plaide coupable à cette accusation, bien sûr!

Par contre, nos trois distingués arbitres ne répondent pas
à la question qui leur a été posée dans la Section 7 ci-dessus, et
à laquelle ils doivent répondre de par leur mandat.

Avant le courriel contrevenant de S. Jetchick du 5 février,
M. Loignon aurait, selon moi, lui-même contrevenu à plusieurs
règlements du concours, tous plus graves qu'un simple excès de longueur.

La longueur excessive de ma réponse du 5 février a été rendue nécessaire
à cause de ces infractions initiales de M. Loignon.

J'attends donc le Rapport No. 2 de nos distingués arbitres!

Au plaisir!

Stefan

5.9) G. Loignon (2008-février-12)

Original de ce message sur le site de Guillaume.

-----Original Message-----
From: Guillaume Loignon
Sent: 12 février 2008 18:08
To: Stefan Jetchick
Subject: Re: Commentaires de S. Jetchick sur le Rapport d'arbitrage # 1

Salut Stefan,

Il semblerait que les arbitres sont retournés débattre de notre
sort, mais il reste que c'est à mon tour de jouer et que je ne
voudrais pas abuser du délai. J'ai donc publié mon texte quand
même.

Je t'envoie le code html.

Cordialement

GL

===================================================================
Salutations à Stefan ainsi qu'aux arbitres, messieurs Labelle,
Haméon et Ouellette.

Je voudrais commencer en indiquant que je m'engage à ne plus
aborder la religion catholique d'une manière ou d'une autre. Ce ne
sera pas nécessaire. Ma position ne requiert pas d'attaquer Dieu ou
la foi en Dieu. La voici, en quelques mots: la moralité est
autonome par rapport à Dieu. Pourquoi? Car il n'y a aucune raison
de croire autrement.

Soyons francs: quel rôle pourrait réellement jouer un dieu dans la
moralité? On pourrait, certes, en recenser quelques-uns (Source:
David O. Brink, «The Autonomy of Ethics» The Cambridge Companion
to Atheism, Cambridge University Press, 2007.):

The Autonomy of Ethics

Lors des premiers échanges, nous nous sommes entendus sur le
premier rôle: Dieu n'a pas créé de lois morales arbitraires; le
bien et le mal découlent plutôt de l'organisation des choses. Je
crois aussi que tu rejettes le rôle #3, admettant que des athées
peuvent agir tout aussi moralement que des croyants. Le débat s'est
donc orienté sur le deuxième rôle.

Selon ta conception, il ne peut y avoir de conscience sans
l'intervention d'un être créateur. J'ai plutôt proposé la théorie
de l'évolution comme source possible de la conscience. Les raisons
motivant cette préférence m'ont semblé, de ton côté, plutôt
religieuses et esthétiques. D'une manière ou d'une autre, cela ne
risque pas de convaincre les arbitres. Pour ma part, j'ai une
préférence avouée, sur le plan esthétique, pour le monisme fort.
Comme je l'ai indiqué par une boutade, « j'aime mes atomes »,
quoique « j'aime mes quarks et mes gluons » aurait probablement été
plus adéquat. J'assume totalement ce parti-pris. Cependant, ce
n'est pas ce qui me mène à penser que la conscience a pu émerger
via l'évolution biologique. C'est plutôt l'étude de l'évolution
elle- même, ainsi que des neurosciences, qui m'ont amené à ce point
de vue. Bref, quand tu dis que je confonds matérialisme
méthodologique et philosophique, je plaide coupable. Mais pour le
reste, c'est encore la foi contre la science.

Si tu souhaites faire basculer le débat vers « la conscience a-t-
elle pu émerger par des processus évolutifs », j'embarque
volontiers, même si je ne me suis pas « enlisté » pour ça
initialement. Je me demande tout de même: quels arguments as-tu
pour appuyer ton point de vue sur cette question
(l'intervention divine) ? Ou peut-être as-tu songé à un autre rôle
possiblement tenu par Dieu?

Très cordialement,
GL

5.10) Rapport d'arbitrage No. 2 (2008-février-13)

-----Original Message-----
From: Gildas Haméon
Sent: 13 février 2008 13:56
To: Denis Labelle; Jean Ouellette; Gildas Haméon; Stefan Jetchick;
Guillaume Loignon Subject: Rapport d'arbitrage # 2

Suite à la demande de Stefan du 5 février (5.6), nous avons eu
quelques échanges afin de préciser notre façon d'intervenir en tant
qu'arbitres de ce débat.

Nous avons choisi de communiquer entre nous, de prendre des
décisions communes lorsque c'est possible et de les communiquer de
façon brève et concise. Nous ne souhaitons pas que l'arbitrage soit
l'occasion d'un débat parallèle.
Bien évidemment, lorsqu'un des arbitres est en désaccord avec la
position des autres, il a toute liberté pour s'exprimer.

Nous nous sommes entendus sur la façon d'interpréter notre mandat
puisque celui-ci restait vague tant dans les règlements que dans les
échanges préliminaires. Nous prenons en compte dans nos jugements
afin "d'évaluer qui défend sa thèse le mieux" :

Respect de la règle de longueur des messages, définition des termes
et concepts utilisés, clarté et concision (ce qui veut dire aussi
que l'argumentation doit être dans le message et non pas dans une
référence), structure de l'argumentation ("rationnelle,
scientifique..."), utilisation "pertinente" des concedos (le concedo
n'est pas un objectif en soi), neutralité du ton dans la mesure du
possible, éviter les accusations à la légère et laisser les
jugements aux arbitres.

En ce qui concerne la demande de Stefan et le premier rapport
d'arbitrage :

Nous n'avons pas donné suite à la demande de carton jaune de Stefan
parce que nous avons jugé que parmi les fautes qu'il reproche à
Guillaume, certaines sont sans fondements suffisants et les autres
sont sans gravité et pourraient facilement lui être reprochées à lui
aussi.

Nous avons jugé nécessaire de faire une intervention sur la longueur
des messages parce que le problème allait en s'amplifiant.

Gildas Haméon, Denis Labelle, Jean Ouellette

5.11) Petit cours d'arbitrage aux arbitres (2008-février-14)

Désolé, ça va piquer un peu.
Désolé, ça va piquer un peu.

-----Original Message-----
From: Stefan Jetchick
Sent: 14 février 2008 08:41
To: Gildas Haméon; Denis Labelle; Jean Ouellette; Guillaume Loignon
Subject: RE: Rapport d'arbitrage # 2

Bonjour Messieurs les Arbitres,

Apparemment, vous avez des difficultés avec le concept «d'arbitrage
d'un débat». Je vais donc vous donner un petit cours. Je vais essayer
d'être très respectueux, mais je m'excuse, ça risque de piquer un peu.


>> le concedo
>> n'est pas un objectif en soi

Êtes-vous sûr d'avoir lu les règlements de ce concours?

L'effort honnête et sérieux pour chercher des choses sur
lesquelles ont s'entend n'est pas le parfum et le maquillage
d'un débat constructif. C'est le coeur et les poumons.

C'est expliqué clairement ici et ici dans les règlements.

Je ne vois rien de vague dans ce règlement. De plus, on peut
calculer le nombre de «Concedos» de Guillaume en quatre
courriels: zéro.

Comme Guillaume n'a pas besoin de lire ce que j'écris (puisque
les arbitres ne lui reprocheront jamais de ne pas faire
d'efforts en ce sens), il peut ignorer ce qu'il ne veut pas voir,
et faire semblant de rien. J'aurai beau présenter les meilleurs
arguments du monde, peine perdue.

De plus, comme les arbitres laissent Guillaume ignorer ce
que je dis, je peux poser les meilleures questions du monde,
et Guillaume n'a qu'à les ignorer. Par exemple, voilà deux
couriels d'affilée que je demande une réponse aux questions
[13] et [15]. Ces questions sont critiques;
si j'ai raison, toute la théorie de Guillaume sur l'évolution
tombe à l'eau, et si j'ai tort, Guillaume a gagné le débat.
Même chose avec les affirmations [23], [25] et [26].


>> parmi les fautes qu'il reproche à
>> Guillaume, certaines sont sans fondements suffisants et les autres
>> sont sans gravité

Faisons une expérience scientifique pour voir si vous êtes
d'accord avec vos propres affirmations.

Prenez une feuille 8.5 x 11. Mettez-y vos quatre photos, celles
des trois arbitres et celle de Guillaume. Rajoutez vos noms et
vos adresses. Ensuite, racontez exactement le même petit conte
amusant sur le dogmatisme, mais en substituant le Coran à la Bible.
Allez distribuer dans une mosquée à Montréal, et ensuite demandez
à ces gens si c'est «sans fondement ou sans gravité».

Si ces gens vous répondent «Oui», alors je concède la victoire à
Guillaume. Sinon, j'ai gagné.

Stefan


Annexe: Courriels après la suspension du débat par S. Jetchick

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